L'administration par voie nasale d'un vaccin thérapeutique anticancéreux permet de rejoindre et de stimuler des populations particulières de cellules immunitaires comparativement à l'administration par voie intramusculaire ou sous-cutanée, montre une étude française publiée dans la revue Nature Communications.

La voie nasale semble indispensable à la stimulation d’une population particulière de lymphocytes T mémoires capables de contrôler à eux seuls la croissance tumorale chez la souris, rapporte le communiqué de l'Inserm.

Ces cellules T sont appelées « mémoires », car, une fois activées par la rencontre avec un agent pathogène, elles permettent de lutter plus efficacement contre lui en cas de nouvelle rencontre. Elles sont en outre qualifiées de « Trm », pour « TissueResident memory T cells », car elles ont la particularité de se maintenir dans les tissus, à l’endroit même où elles ont été activées.

Ces cellules sont présentes dans les muqueuses des voies respiratoires, digestives, pulmonaires et génitales, mais aussi dans la peau. « Il s’agit en quelque sorte de sentinelles qui patrouillent au niveau des muqueuses », explique Eric Tartour, responsable de ces travaux conduits en collaboration avec l’équipe dirigée par Ludger Johannes.

Les chercheurs ont étudié l'effet d'un vaccin thérapeutique expérimental contre des tumeurs de la tête et du cou chez des souris.

Ce vaccin est capable de stimuler les lymphocytes T-CD8 contre les cellules cancéreuses. Lorsqu’il était administré par voie nasale, une activation de cellules Trm était aussi constatée. La croissance de tumeurs était stoppée chez les souris vaccinées par voie nasale, alors que les animaux contrôles mourraient au bout d’un mois. En comparaison, le même vaccin injecté par voie intramusculaire ne sauvait que la moitié des animaux.

La voie nasale pour plusieurs types de cancers

Les chercheurs ont aussi constaté, chez des patients atteints de cancer du poumon, que la présence d’un grand nombre de cellules Trm dans leurs tumeurs était associée aux formes les moins agressives de la maladie et aux meilleures chances de survie. Induire ces cellules grâce à un vaccin paraît donc une stratégie prometteuse.

Par ailleurs, il existe des systèmes de communication entre les muqueuses. Des travaux antérieurs ont montré que la voie nasale peut induire une réponse immunitaire jusque dans les voies génitales, suggérant que les Trm pourraient être activées à distance de la voie d’administration. Il n’est donc pas impossible que l’administration par voie nasale puisse améliorer l’efficacité de vaccins contre des cancers du col de l’utérus ou encore de l’endomètre.

« Le choix de la voie d’administration du vaccin est vraiment primordiale, insiste Eric Tartour. La voie nasale semble être la seule qui permette d’induire de manière efficace ces cellules Trm au niveau des muqueuses de la sphère ORL et pulmonaire. Avec une vaccination par voie intramusculaire ou sous-cutanée, on active des cellules mémoires différentes, qui ne sont pas éduquées pour arriver sur le site tumoral distant de la voie d’immunisation. Certains développements de vaccins contre les cancers du poumon se sont soldés par un échec. Peut-être qu’ils ne sont pas totalement inefficaces, mais que la voie d’administration est à revoir », suggère-t-il.

Les chercheurs viennent de commencer un essai préclinique chez le primate pour comparer l’efficacité d’un vaccin thérapeutique contre des cancers muqueux (ORL ou poumon) lorsqu’il est administré par voie nasale ou par voie intramusculaire. Si les résultats sont positifs, un essai chez l'humain pourrait suivre.

« L’immunothérapie est en train de révolutionner la prise en charge du cancer, mais seulement 25 à 30% des patients sont répondeurs. Pour les autres, l’association d’un vaccin pourrait permettre d’induire une réponse immunitaire qui serait ensuite stimulée par l’immunothérapie afin d’éliminer la tumeur. C’est pourquoi nous devons continuer d’améliorer les stratégies vaccinales et de rechercher les plus efficaces », explique le chercheur.

Psychomédia avec source : Inserm.
Tous droits réservés.