Depuis plusieurs années, les groupes communautaires québécois ont vu leur financement transformé, notamment par l'arrivée de nouvelles fondations privées et des PPP sociaux.

Des chercheurs (1) de l'Institut de recherche et d'informations socio-économiques (IRIS) ont réalisé une étude auprès de 347 groupes communautaires pour comprendre les conséquences de ces changements dans leur financement, sur les services qu'ils offrent à la population et sur leur contribution à la société québécoise.

L'étude conclut que ces nouvelles fondations privées indique un changement dans les rapports entre les bailleurs de fonds et les organismes communautaires.

Ces fondations imposent un fonctionnement qui s’inspire du milieu des affaires dont la dynamique «descendante» plus hiérarchique contraste avec l’approche «ascendante» plus démocratique des milieux communautaires.

"Au Québec, les milieux communautaires font l’expérience de la nouvelle philanthropie au contact de la Fondation Lucie et André Chagnon (FLAC). Celle-ci pousse cependant la logique de la nouvelle philanthropie plus loin que dans le reste du Canada et aux États-Unis en mettant sur pied des partenariats avec l’État."

Les fondations de la "nouvelle philanthropie" amènent généralement les organismes à concentrer leurs activités sur la dispensation de services qui ne correspondent pas nécessairement à leur mission, et à réduire leurs activités politiques et de défense collective des droits, indiquent les chercheurs. Cette crainte est exprimée vis-à-vis de la Fondation Chagnon: "Les stratégies de la FLAC font, selon plusieurs intervenants, courir le risque d’une uniformisation des orientations, des points de vue, des visions, des missions et des actions des organismes communautaires, ce qui contribue à modifier leur rôle envers les populations qu’ils servent."

Parmi les conséquences de ces nouveaux modes de financement, les intervenant·e·s du milieu communautaire identifient une bureaucratisation et une dégradation des conditions de travail. "Cette gouvernance managériale imposée aux groupes s'accompagne aussi de lourdes tâches de reddition de comptes. Parmi les groupes étudiés, 62% (...) ont vu une augmentation importante du nombre de rapports, de données ou de statistiques à fournir aux bailleurs de fonds. Sur de minuscules équipes, il y a parfois trois personnes qui se consacrent uniquement à la paperasse."

Ces modes de financement favorisent aussi la mise en place de tarifs pour les activités et services organisés par les groupes. Une tarification qui sert à diminuer la participation aux activités des organismes qui n'ont pas les ressources pour répondre à la demande.

(1) Julie Depelteau, Francis Fortier et Guillaume Hébert

Rapport de l'IRIS : Les organismes communautaires au Québec: Financement et évolution des pratiques.

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