Les actions de groupe (recours collectif), introduites dans le nouveau projet de loi Santé présenté par la ministre de santé le 19 juin 2014, ne sont pas suffisantes pour protéger les victimes d'effets secondaires indésirables des médicaments, estiment le Collectif Europe et Médicament et d'autres organisations et associations de victimes (1) dans un communiqué.

Une évolution des droits européen et français est nécessaire pour rétablir des régimes de responsabilité des compagnies pharmaceutiques plus pertinents, expliquent-ils.

"En effet, depuis l'application d'une directive européenne de 1985 relative aux produits défectueux (transposée en France en 1998), les firmes pharmaceutiques n'ont plus d'obligation de sécurité de résultat vis-à-vis des patients, disposant dès lors d'une quasi-immunité."

"Les victimes d'un effet indésirable grave d'un médicament ne peuvent engager la responsabilité du fabricant que si elles prouvent la défectuosité du médicament (…). En pratique, si l'effet indésirable grave dont elles ont souffert était mentionné dans la notice, le médicament n'est pas considéré comme défectueux et la firme ne devra pas indemniser la victime (…).

"En France, la loi relative aux droits de malades de 2002 (loi Kouchner) prévoyait que, dans certains cas, la solidarité nationale puisse indemniser les victimes d'effets indésirables quand les fabricants ne pouvaient pas voir leur responsabilité engagée. Cependant, en pratique, une minorité de victimes sont indemnisées par la solidarité nationale (Office national d'indemnisation des accidents médicaux, ONIAM). C'est en effet sur les victimes que repose la charge de la preuve, et elles ont des difficultés majeures à faire reconnaître l'imputabilité du médicament dans la survenue du dommage face aux experts. De plus, leurs séquelles sont souvent sous-estimées, ne leur permettant pas d'atteindre le seuil de gravité très élevé requis pour être indemnisées."

Conjointement avec d’autres organisations, le Collectif Europe et Médicament (dont est notamment membre la revue Prescrire) publiera prochainement un état des lieux détaillé de la situation, permettant de prendre la mesure des difficultés des victimes." Il présentera ses recommandations, notamment:

  • rétablir, au niveau européen, le régime de la responsabilité des firmes avec obligation de sécurité de résultat vis-à-vis des patients. La France peut être l’État membre moteur de cette évolution (…);

  • rendre publiquement accessibles l’ensemble des éléments permettant à la victime d’étayer l’imputabilité médicamenteuse. Au-delà des données administratives de l’assurance maladie (open data), il s’agit aussi et surtout de permettre l’accès public : aux résultats détaillés des essais cliniques (…); et à la base française de pharmacovigilance (observations détaillées mais sous forme anonymisée);

  • améliorer le fonctionnement de l’ONIAM (…) : réduction du seuil de gravité afin d’exclure moins de victimes aux séquelles graves mais sous-estimées ; création d’un régime spécial de responsabilité pour les médicaments figurant sur la liste des médicaments sous surveillance supplémentaire ; etc.

En France, rappelle le communiqué, le nombre de morts causées par les médicaments peut être estimé de l'ordre de 20 000 par an. C'est environ 6 fois plus que la mortalité routière.

Communiqué sur le site de Prescrire: Loi de santé publique française - Actions de groupe : nécessaires, mais pas suffisantes

(1) Le communiqué est cosigné par : l'Association des accidentés de la vie, le CLAIM (Collectif de Lutte contre les Affections Iatrogènes Médicamenteuses), Irène Frachon, pneumologue ayant alerté sur les effets indésirables du (Mediator), le Réseau D.E.S. France et l’association Les Filles DES.

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