La journaliste Pauline Gravel du journal Le Devoir a rencontré le psychologue cognitif et neuroscientifique français Stanislas Dehaene, auteur du livre Le Code de la conscience, publié en 2014 chez Odile Jacob.

Les recherches, dont celles l'auteur, ont identifié des mécanismes cérébraux qui se produisent quand nous prenons conscience d’une information, qu’il s’agisse d’un élément de la scène devant nos yeux, d’un son que nous entendons ou d’un souvenir qui resurgit, rapporte-t-elle.

L'auteur a conçu, par exemple, des expériences consistant à présenter un mot à des volontaires pendant une durée très brève. Bien que le mot soit perçu par le système visuel, il demeure invisible à la conscience lorsque la durée de sa présentation est inférieure à 50 millisecondes (il est alors dit subliminal). Mais si sa durée excède 60 millisecondes, le mot accède à la conscience, et l’observateur affirme l’avoir vu.

La présentation subliminale du mot fait l’objet d’un traitement par le cortex visuel. Lorsque le mot accède à la conscience, survient une activation intense et soudaine dans les régions pariétales et préfrontales des deux hémisphères du cerveau.

La conscience ne peut traiter qu’une seule information ou idée à la fois, explique le chercheur. « Nous ne pensons jamais vraiment simultanément à deux idées distinctes. En vérité, l’une d’entre elles accède à la conscience en premier, tandis que l’autre doit attendre que l’espace conscient soit libéré. » Tant que dure l’analyse de la première, la second stationne dans une mémoire inconsciente.

« L’idée que l’on peut faire deux choses en même temps est très largement une illusion. Le seul cas dans lequel il peut y avoir un traitement parallèle, c’est s’il y a un traitement qui est complètement automatisé, comme conduire sa voiture en même temps que nous réfléchissons à quelque chose ou que nous écoutons les nouvelles à la radio, parce que la conduite automobile a été automatisée et qu’elle est tombée dans le non-conscient ».

Mais le cerveau traite inconsciemment une multitude d’informations en parallèle. Ainsi, au cours de l’entretien qu’il accorde à la journaliste, M. Dehaene lui explique que son cortex visuel traite simultanément son visage d’intervieweuse ainsi que tous les objets qui l’entourent. En même temps, son cerveau perçoit aussi les bruits ambiants, ainsi que le son de la voix qui l’interroge. Son corps se réajuste constamment pour maintenir son équilibre. Tous ces circuits travaillent en parallèle, mais une seule de ces différentes perceptions accède à sa conscience.

La conscience a une fonction importante. « L’accès à la conscience amène une information au premier plan de notre pensée et la rend ainsi disponible à l’ensemble de nos facultés intellectuelles, à diverses opérations mentales, comme le langage, la mémoire, la prise de décision », écrit M. Dehaene.

Lire l'article du Devoir qui, notamment, poursuit sur les études permettant de détecter la conscience chez les personnes dans un état comateux, végétatif ou de conscience minimale : L’énigme de la conscience.

Vidéo Conférence donnée l'auteur à l'Université du Québec à Montréal (UQAM): D’où viennent nos perceptions, nos sentiments, nos illusions et nos rêves?

(1) Stanislas Dehaene est titulaire de la chaire de Psychologie cognitive expérimentale et directeur de l’unité INSERM-CEA de neuroimagerie cognitive. Il est Lauréat du grand prix INSERM 2013. Le livre a été élu meilleur livre de science 2014 par la revue Lire. Stanislas Dehaene est l’auteur de plusieurs ouvrages de vulgarisation.

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