Des chercheurs américains rapportent, dans la revue Nature, avoir réussi à altérer "l'alphabet fondamental de la vie", créant un organisme ayant un code génétique partiellement artificiel dans son ADN.

Cette réalisation pourrait éventuellement mener à des organismes pouvant produire des médicaments, vaccins, nouveaux antibiotiques ou produits industriels que les cellules naturelles ne peuvent produire, rapporte le New York Times. Elle donne également un certain soutien à l'idée que la vie pourrait exister ailleurs dans l'univers en utilisant des constituants génétiques différents de ceux de la Terre.

C'est la première fois qu'une cellule vivante fonctionne avec un alphabet génétique étranger et le reproduit. Il s'agit d'une grande première en biologie synthétique (parfois appelée xénobiologie), un champ de recherche naissant qui implique la création de systèmes biologiques destinés à des fins spécifiques.

Malgré la grande diversité de la vie sur Terre, toutes les espèces, des simples bactéries aux êtres humains, ont un code génétique constitué du même alphabet de 4 bases (appelées nucléotides) : A, C, G et T.

La séquence de ces unités détermine les protéines que les cellules produisent. Ces protéines font la plupart du travail dans les cellules et sont nécessaires pour la structure, la fonction et la régulation des tissus et organes du corps.

Floyd E. Romesberg du Scripps Research Institute et ses collègues ont créé deux nouvelles bases, appelées X et Y. Ils ont inséré une paire X-Y dans la bactérie bacterium E. coli commune. Les bactéries ont été capables de se reproduire normalement, bien qu'un peu plus lentement que d'habitude, en répliquant les nucléotides X et Y en même temps que les nucléotides naturels. L'article rapporte 24 réplications en 15 heures.

Les bactéries avaient ainsi un code génétique de 6 lettres plutôt que 4, leur permettant peut-être de produire de nouvelles protéines qui pourraient fonctionner d'une manière complètement différente de celles créées naturellement. Les chercheurs n'ont pas encore démontré que ces nucléotides artificiels peuvent réellement produire des protéines. Mais des travaux menés par d'autres équipes suggèrent que cela peut être fait.

Romesberg se fait rassurant concernant les préoccupations selon lesquelles les nouveaux organismes pourraient se déchaîner et causer des dommages, car, explique-t-il, les bactéries ainsi créées doivent être nourries avec les nucléotides synthétiques. Si des bactéries s'échappent dans l'environnement ou entrent dans le corps de quelqu'un, elles ne seraient pas en mesure d'obtenir le matériel synthétique nécessaire et mourraient ou reviendraient à leur utilisation d'ADN naturel. Elles ne pourraient jamais infecter quoi que ce soit (puisqu'elles ne pourraient se reproduire), dit-il.

Outre les applications pratiques possibles, la recherche dans le domaine pourrait faire la lumière sur la raison pour laquelle les êtres vivants ont évolué avec 4 nucléotides. Il se pourrait que 4 soit le nombre le plus efficace; dans un tel cas les organismes avec des codes génétiques élargis pourraient ne pas fonctionner très bien.

Psychomédia avec source: New York Times.
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