Posté par Dada le 05-10-01
Canada
féminin
31
oui
très grave
Je suis une psychologue avec un gros dilemme. Une bonne amie a moi a un garcon de 13 ans et une fille de 11 ans. La jeune fille est trisomique. Je connait les enfants depuis leur naissance, mais j'ai perdu de vue cette famille, parce
qu'elle a demenagee aux Etats-Unis. Cela fait a peu pres 2 mois qu'elle habite de nouveau au Quebec.

Lors d'un souper entre amis, le garcon insiste pour me parler (sachant que je suis psychologue). Il commence a me raconter comment il ne se sent pas bien dans sa peau, qu'il pense parfois se suicider... Je lui ai demande s'il en a parle avec ses parents, mais il me dit qu'ils sont trop occupes.

Chaque fois qu'il veut devoiler sa peine, leur travail ou leur fille les appellent. Le probleme est que ce jeune homme a une reputation de menteur depuis son tout jeune age. Soit pour s'amuser ou pour tirer avantage d'une situation, il ment.

J'avais deja prevenu les parents a ce sujet, mais ils n'y ont pas prete grande attention. Etant donne cela, j'etais tres sceptique et en meme temps bouleversee quand il m'avoue qu'il a commis quelque chose de tres grave: il a touche a plusieurs reprises, de facon inapproprie sa jeune soeur (parties genitales, seins...).

Ses parents ont toujours ete contre les professionnels de la sante mentale, du a leur mauvaise experience avec leur fille trisomique. Ils etaient tres refractaires a l'idee que je leur conseille que le garcon voie un specialiste a cause de ses mensonges compulsifs. J'ai tente d'interroger les parents sans pour autant leur reveler la vraie nature de mes questions, mais en vain. Lors de notre entretien, le garcon m'a promis qu'il ne recommencerait plus. En meme temps, il m'a fait promettre de ne pas en parler a personne, meme pas a ses parents.

D'apres le code deontologique, je ne peux pas le suivre. Mais, en meme temps, ses parents ne veulent rien savoir des psychologues. Finalement, 2 semaines plus tard, j'ai decide de parler aux parents et de leur dire ce que le jeune homme m'avait confie. Au debut, ils refusaient de me croire, ensuite, ils refusaient de croire ce que leur fils racontait. Je leur ai explique que dans n'importe quel cas, que ce soit vrai ou non, il a besoin de consulter.

Evidemment, c'etait le refus categorique.

Je ne sais que faire. Leur fille n'a pas la capacite de comprendre ce que je lui demande et, de toute facon, il me faudrait le consentement des parents. C'est un tres gros dilemme pour moi.

Pouvez-vous m'aider? De par ma relation intime avec cette famille, je ne peux pas y voir tres clair.

Réponse à Dada (agression sexuelle)
05-10-01

Bonjour Dada,

Votre dilemme est grand en effet et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, il s'agit d'une bonne amie à vous; deuxièmement, vous avez fait l'objet de confidences du jeune homme, confidences qui laissent entendre à la fois un risque suicidaire de sa part et la possibilité d'attouchements sexuels qu'il aurait commis sur sa sœur, et troisièmement ce dernier a une réputation de menteur, laquelle laisse croire qu'il aurait pu tout inventer.

Dans ce genre de situation, vous êtes comme tout citoyen qui entend que le développement ou la sécurité d'un enfant est compromis (Loi de la protection de la jeunesse).

Vous avez fait ce que le bon sens vous commande de faire : vous avez poussé le parent à consulter sans délai.

Le fait que votre bonne amie soit "contre les professionnels de la santé" ne change rien à la Loi. Et le fait que le jeune homme ait une réputation de menteur non plus (les menteurs disent aussi parfois la vérité).

Selon mon opinion, vous êtes acculée à dénoncer la situation à la Direction de la protection de la jeunesse si vous avez des motifs raisonnables de croire que la sécurité ou le développement du garçon, et de sa sœur aussi, sont compromis. Il apparaît évidemment monstrueux de porter plainte contre une amie, mais je vous invite plutôt à voir la situation sous un autre angle : vous faites une demande d'enquête à la D.P.J. pour protéger les enfants dû au fait que leur mère n'est pas suffisamment consciente de la gravité de la situation.

Il va sans dire que vous pouvez informer votre amie que la loi vous oblige à le faire et que vous le ferez si elle-même ne se décide pas à consulter. Cette option m'apparaît préférable à celle qui consisterait à dénoncer la situation à la D.P.J. derrière son dos. Sans compter que votre avertissement lui servira très probablement d'incitatif à agir elle-même.
Bien à vous.
Georges-Henri Arenstein
Psychologue