Réponse à: OCTAVIE (conduite automobile)

Surnom: OCTAVIE
Pays: Québec
Âge: 33
Sexe: féminin

Bonjour et félicitation pour votre site qui est très éducatif. Bien que ce soit la quatrième fois où je pose une question et que l'on ne m'ait jamais répondu, je trouve tout de même intéressant de lire les autres. Parfois, certains conseils dans une situation donnée sont également très valables si transposés dans une autre situation. Alors merci encore pour votre site.

La question qui me chicote est la suivante: comment faire comprendre à un conducteur d'automobile que sa conduite est dangeureuse et irresponsable? Je vous expose les faits: mon chum a 38 ans, il conduit une voiture plutôt puissante qu'il s'amuse à pousser question de s'amuser un peu . Lorsque je suis dans la voiture, je deviens tendue et j'ai peur. Nos deux fils quant à eux ont des réactions bien différentes. Le plus jeune (7 ans) a aussi peur que moi. Le plus vieux (13 ans) trouve très cool que son père roule très vite (une fois, jusqu'à 190km-heure - ils étaient même déçus de ne pas s'être rendus à 200!). Il se plait à raconter aux enfants qu'il conduit vite, mais bien. Ca lui suffit de se convaincre que c'est OK, mais qu'en est-il des enfants. J'ai parfois l'impression que ce modèle est mauvais pour eux. Comme si leur père était au dessus des lois et du danger.

Au-delà de l'exemple qu'il peut donner aux enfants, il me fout une trouille du diable à chaque voyage en automobile.

Bien qu'il sache que mon père s'est rivé le nez il y a plusieurs années et qu'il ait passé 2 ans hospitalisé (une méchante collision frontale non responsable); qu'il vive le quotidien avec moi qui suit légèrement handicapée et donc craintive de souffrir de nouveau, il ne change en rien son comportement sur la route.

Il pousse presque les voitures qui le précèdent, en les suivant de très très près, afin qu'elles lui cèdent le passage. Parfois, les autres automobilistes doivent même faire des manoeuvres très rapides pour se ranger dans une autre voie.

Mon malaise, je l'ai exprimé de toutes les façons: calmement lorsque nous ne sommes pas en voiture, lorsque nous sommes en voiture également. Comme je me sens prisonnière, c'est parfois en hurlant et maintenant, en pleurant. C'est physique, plus fort que moi,j'ai peur.

Dans les derniers mois, il m'a conseillé de consulter pour maîtriser cette peur. J'y ai pensé. J'en ai parlé avec d'autres proches et j'ai réalisé que finalement, il n'y avait qu'avec lui que j'avais peur en auto. Aucun autre conducteur avec qui je monte ne me rends mal ou inquiète.

Je ne sais plus quoi faire pour lui faire comprendre mon malaise. Les week-ends, nous les passons à la campagne où une balade de 120km nous est nécessaire pour s'y rendre. Le chemin est sinueux, mais ça ne le ralenti pas.

Y a-t-il une façon que vous pourriez me suggérer afin de lui faire comprendre les risques qu'il nous fait encourir.

C'est un homme très éduqué, très intelligent et qui réussit bien sa vie en général. Il n'est pas suicidaire, mais parfois, j'en doute presque à le voir conduire de la sorte.

Je n'ai aucun doute sur le fait que nous (sa famille) soyons ce qu'il a de plus cher, mais je n'arrive pas à comprendre ses motivations et son refus d'avoir le pied un peu plus léger.

Au secours!

Bonjour Octavie,

Merci pour votre indulgence et votre compréhension, telles que mentionnées au premier paragraphe de votre lettre, et merci pour vos bons mots relativement à cette rubrique.

Je suis effaré de constater qu'un homme de 38 ans, en couple, avec deux enfants, puisse manifester un tel comportement que je n'hésite pas à qualifier de suicidaire. Vous nous dites qu'il est éduqué, intelligent, et qu'il réussit bien sa vie en général. Il n'est donc ni ignorant, ni inconscient, loin de là.

Peut-être que votre chum appartient à cette catégorie de personnes qui a besoin de vivre dangereusement pour se sentir exister. Chez elles, la peur est présente, mais elle ne transmet pas de message «Attention, danger, arrête !». Elle transmet plutôt un message d'excitation et de plaisir. D'où l'envie de recommencer.

Rouler à 190 km / heure est dangereux, pour lui-même, pour les passagers et pour les autres automobilistes. Votre mari se pense peut-être au-dessus des lois et du danger, mais il va sans dire que c'est une illusion pure. Il dit qu'il conduit vite, mais bien ? Je n'en doute pas, il doit conduire très bien. Mais à cette vitesse, il n'est plus maître de la situation !

Ceci dit, je constate que l'enjeu, pour vous, est de lui faire comprendre qu'il agit mal. Vous nous demandez des suggestions afin de lui faire comprendre les risques qu'il encourt et qu'il fait encourir. Mais Octavie . il sait et il comprend, c'est sûr et certain. L'excitation, le «thrill» est affaire d'émotion et non de compréhension. C'est lui-même et personne d'autre, qui peut agir, sentir, changer des choses. Ce n'est pas à vous de vous fendre en quatre pour tenter de lui expliquer ce qu'il sait déjà.

Votre mari vous invite à consulter pour maîtriser votre peur ? Il a le sens de l'humour, c'est certain ! Avoir peur dans une situation dangereuse est sain et ne requiert aucun changement.

Quant à vous, je suis surpris que vous embarquiez encore dans ce véhicule et que vous autorisiez vos enfants à monter à bord. Je vais vous faire un aveu : je refuserais de m'asseoir dans cette auto à votre place. Les balades à la campagne ? Prenez l'autobus. Les sorties ? Prenez le taxi.

Bien à vous,

Georges-Henri Arenstein, Psychologue