Une substance extraite de pousses de brocoli, le sulforaphane, soulagerait les symptômes comportementaux des troubles du spectre de l'autisme, selon une petite étude clinique publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences. Le sulforaphane est jusqu'à maintenant surtout connu pour ses capacités alléguées de prévention du cancer.

Paul Talalay et Andrew Zimmerman de l'Université Johns Hopkins ont, avec leurs collègues, mené cette étude avec 40 adolescents et jeunes adultes atteints d'autisme sévère à modéré, âgés de 13 à 27 ans.

"Nous pensons que ces résultats peuvent constituer des évidences préliminaires d'un premier traitement de l'autisme qui améliore les symptômes de l'autisme en corrigeant, apparemment, certains des problèmes cellulaires sous-jacents", dit Talalay. "Nous sommes loin d'être en mesure de déclarer une victoire sur l'autisme, mais cela nous donne des informations importantes sur ce qui pourrait aider," ajoute Zimmerman.

Plusieurs des anomalies biochimiques et moléculaires accompagnant l'autisme qui ont été décrites sont liées à l'efficacité de la production d'énergie dans les cellules. Les cellules des personnes atteintes ont souvent des niveaux élevés de stress oxydatif causé par l'accumulation de sous-produits nuisibles de l'utilisation d'oxygène qui peut causer une inflammation, endommager l'ADN, et conduire à des cancers et d'autres maladies chroniques.

En 1992, l'équipe de Talalay a découvert que le sulforaphane a une certaine capacité à renforcer les défenses naturelles de l'organisme contre le stress oxydatif, l'inflammation et les dommages de l'ADN.

Il s'est avéré plus tard que la substance améliore aussi la réponse de l'organisme au choc de chaleur : il s'agit d'une cascade d'événements qui protège les cellules contre le stress causé par des températures élevées, incluant celles de la fièvre. Or, fait intrigant, explique le chercheur, environ la moitié des parents rapportent que le comportement autiste de leurs enfants s'améliore sensiblement quand ils ont de la fièvre, puis revient à la normale quand la fièvre disparaît. En 2007, Zimmerman a mené une étude clinique qui a confirmé ce phénomène, sans toutefois identifier de mécanisme sous-jacent.

Parce que la fièvre, comme le sulforaphane, initie la réponse de l'organisme au choc thermique, Zimmerman et Talalay se sont demandé si le sulforaphane pourrait provoquer la même amélioration temporaire de l'autisme que la fièvre.

Pendant 18 semaines, 26 des participants désignés au hasard recevaient quotidiennement, selon leur poids, une dose de 9 à 27 milligrammes de sulforaphane. Les autres recevaient un placebo.

La plupart de ceux qui ont répondu positivement au sulforaphane ont présenté des améliorations lors de mesures (1) réalisées après 4 semaines et ont poursuivi cette amélioration tout au long du traitement.

Après 18 semaines, des améliorations rapportées concernaient les épisodes d'irritabilité, la léthargie, les mouvements répétitifs, l'hyperactivité, la présence cognitive, la communication, la motivation et le maniérisme. 46, 54 et 42 % de ceux ayant reçu le sulforaphane ont présenté des améliorations notables des interactions sociales, des comportements aberrants et de la communication verbale, respectivement. Ces améliorations se sont résorbées après l'arrêt du traitement "comme ce qui arrive chez ceux qui éprouvent des améliorations au cours de la fièvre", note Talalay. "Il semble que le sulforaphane aide temporairement les cellules à faire face à leurs handicaps", dit-il.

Talalay précise que les concentrations de précurseurs de sulforaphane présentes dans différentes variétés de brocoli sont très variables. Et, la capacité des personnes à convertir ces précurseurs en sulforaphane actif varie aussi grandement. Il serait très difficile d'atteindre les niveaux de sulforaphane utilisé dans cette étude par l'ingestion de grandes quantités de brocoli et d'autres légumes crucifères. L'extrait de pousse de brocoli utilisé n'est pas commercialisé.

Le sulforaphane est présent dans le brocoli et les autres légumes crucifères (chou-fleur, chou, choux de Bruxelles, kale…) mais il est particulièrement concentré dans les graines et les pousses de brocoli.

Des études précédentes de l'équipe a montré de le sulforaphane prévient le cancer chez des animaux et modifie des marqueurs biologiques de plusieurs maladies.

(1) Trois questionnaires (tests) étaient remplis par les proches et les médecins des participants qui ne savaient pas qui avaient reçu le sulforaphane ou le placebo : le Aberrant Behavior Checklist (ABC), le Social Responsiveness Scale (SRS) et le Clinical Global Impressions-Improvement scale (CGI-I)

Psychomédia avec sources: Johns Hopkins Medicine (2014), John Hopkins (2010)
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