L'affaire de l'intervention du propriétaire du Journal du dimanche, Arnaud Lagardère qui est un ami de Nicolas Sarkozy, pour empêcher qu'un article révélant que Cécilia Sarkozy n'a pas été voté au second tour de l'élection présidentielle, prend des proportions grandissantes.

C'est après l'intervention du propriétaire du JDD que le directeur de la rédaction

aurait décidé de ne pas publier l'information, considérant que le vote relève de la "sphère privée", même pour le conjoint d’un candidat.

Mais, argumentent les journalistes, le fait d'aller voter ne relève pas de la vie privée, puisque les listes d'émargement sont publiques et peuvent être consultées.

La Société des journalistes du Journal du Dimanche (JDD) dénonce cette ingérence et donne la parole à Dominique Wolton, directeur de l'Institut des sciences de la communication du CNRS, qui affirme que "la presse doit plus que jamais rester un contre-pouvoir".

La Société des journalistes évoque également le cas des journalistes ayant rejoint l'Elysée ou Matignon, "semant un peu plus le doute sur la frontière censée séparer la sphère médiatique des allées du pouvoir, politique ou économique".

Rappelons que Catherine Pégard, qui suivait la campagne de Nicolas Sarkozy pour le Point, conseillera désormais à l'Elysée en matière de communication et Myriam Levy du Figaro qui suivait Ségolène Royal agira comme conseillère pour François Fillon.

"Dans les démocraties médiatisées, chacun doit rester à sa place", écrit Dominique Wolton, la confusion des genres se traduisant par la perte de confiance des opinions publiques.

"Toutes les démocraties sont confrontées à cette contradiction entre les valeurs de liberté de la presse et la concentration croissante des industries de l’information, qu’il faudra bien réguler un jour.

(...) Reste un problème : la perte de crédibilité qui frappe aujourd’hui la presse. Elle est aussi le résultat des liens qu’entretient la hiérarchie médiatique, l’élite de ce métier en quelque sorte, avec les pouvoirs. C’est vrai dans tous les pays. On ne voit plus que cette minorité et non plus le reste de la classe moyenne journalistique, renforçant une perception discutable de ce métier dans les opinions publiques.

Résultat d’autant plus paradoxal, précise M. Wolton, que la culture journalistique est aujourd’hui beaucoup plus consciente de l’importance des libertés et du pluralisme. Défendre la liberté d’expression dans un monde ouvert, saturé de médias et de pressions, est un combat qui est loin d’être terminé. Une bataille qui n’est jamais vraiment gagnée."

De son côté Reporters sans frontières a exprimé sa préoccupation. "Cette affaire montre la nécessité d'organiser un véritable débat, en France, sur les rapports entre pouvoirs politiques, propriétaires de médias et journalistes. Il est plus que jamais nécessaire de réfléchir aux moyens à mettre en place pour préserver les intérêts des actionnaires à investir dans les médias tout en garantissant l'indépendance rédactionnelle de ces derniers."

Le groupe Lagardère possède Le Journal du dimanche, Elle, Europe 1, Paris Match, Première et Télé 7 jours.

En août 2005, Alain Genestar a été écarté de la direction du magazine «Paris Match», également propriété du groupe Lagardère, à la suite de la publication d'une photographie de Cécilia Sarkozy.

Sources:
Le Journal du dimanche
Libération