Les députés français se penchent à partir d’aujourd’hui sur un projet de loi prévoyant d’autoriser, par voie d’ordonnance, une pratique réclamée par les laboratoires pharmaceutiques : "l’accompagnement" des patients par les fabricants de médicaments, afin de les inciter, par contact téléphonique ou visite à domicile, à bien prendre leurs médicaments ("progammes d'aide à l'observance").

Largement répandus aux Etats-Unis, ces programmes consistent généralement à accompagner les patients par différents moyens : Numéro Vert, relance téléphonique, éducation personnalisée du patient, envoi d’infirmiers à domicile. Ils prennent souvent la forme de "coaching".

En France, la pratique est encore rare, mais elle existe, profitant d’un vide juridique. Selon le quotidien « le Monde » daté du 26 décembre, l’Afssaps a été saisie, depuis 2001, d’une quinzaine de demandes d’autorisation par les laboratoires et en a accepté la moitié. Mais les demandes augmentent et le ministère de la Santé juge désormais nécessaire d’encadrer ces programmes.

Pharmaciens et médecins accueillent avec beaucoup de réserve ce projet car il conduirait «à diminuer considérablement, voire à contourner, le rôle joué soit par le pharmacien, soit par le médecin traitant».

Selon la revue « Prescrire »: «Ces programmes contiennent la perspective de dérives importantes (contrôles sanitaires, surmédicamentation, etc.) et contribuent à la marginalisation des soignants et des associations de patients non financées par les firmes.» Elle dénonce des «programmes de fidélisation de la clientèle» ayant pour objectif de récupérer les pertes financières liées à l’arrêt prématuré des traitements, pertes évaluées à 30 milliards de dollars par an. «Comment imaginer qu’une firme, juge et partie, soit en mesure d’expliquer à un patient qu’il devrait mieux arrêter son traitement, ou en changer pour prendre un traitement d’une firme concurrente?», interroge « Prescrire ».

La revue – ainsi que l’ensemble des membres du collectif Europe et médicaments qui regroupe des associations de consommateurs, des professionnels de santé, des malades et des mutuelles – demande aux députés français à ne pas voter l’habilitation du gouvernement à autoriser les programmes d’accompagnement des patients par les laboratoires.

L’UFC-Que Choisir s’indigne également , dans un communiqué publié le 9 janvier :"De toute évidence, le gouvernement cède au vieux rêve de l’industrie pharmaceutique qui, depuis longtemps, tente d’entrer en communication directe avec les patients, en supprimant le filtre du médecin, d’abord de manière privée par les campagnes à domicile puis, à terme, par le biais de campagnes publicitaires massives sur des médicaments soumis à prescription."

Psychomédia avec source:
Le Quotidien du Pharmacien, 11 janvier 2007.
Agora Vox, 11 janvier 2007.