Un couple d’amis subit actuellement une rude expérience. Après avoir vécu un bonheur bien organisé, presque sans nuage et eu un petit garçon adorable, ils ont donné naissance à une petite fille gravement handicapée ; tant mentalement que physiquement.
La venue de cette petite fille à soudainement assombri leur vie. Aucun soutient psychologique pour eux.

Lorsque j’ai quitté, il y a des années, mes amis laissant entre nous des milliers de kilomètres ils avaient l’avenir devant eux. Ils étaient enthousiastes, plein de dynamisme, et n’aspiraient qu’au bonheur. A présent ils sont désespérés, ont sombré dans la déprime au point de perdre tout les deux leur travail et même leur désir de travailler.

C’est à plus de 7000 Km d’eux qu’ils m’ont annoncé la nouvelle suite à mon appel téléphonique. Prise au dépourvu et vu la distance qui nous séparait, je ne savais ni quoi dire ni quoi faire. Depuis, j’ai encore changé de lieu de vie et la communication est devenue encore plus difficile. Je n’ai plus d’autre choix que d’utiliser le mode postal pour prendre de leurs nouvelles mais n’arrive pas à faire le pas. Pourtant, je me sens toujours concernée par leur peine.
Rien de moins aisé que de devoir prendre des nouvelles d’amis en perdition sans pouvoir les serrer dans nos bras ou encore lire dans leurs yeux ce qu’ils ne peuvent exprimer ouvertement. Mais pourtant ils restent dans mon cœur et je ne peux les oublier.
Ce que je redoute le plus c’est que je perde toute relation avec eux car je ne sais comment les approcher sans risquer de blesser.
Quoi dire pour les réconforter ? Je ne les connais plus. Je ne sais plus qui ils sont. Juste qu’il reste en moi ce souvenir de forte amitié qui nous liait avant mon départ des années auparavant.

Leur désespoir me fait peur provoquant en moi la hantise de ne pas être à la hauteur.
J’aimerai tellement raccourcir la distance qui nous sépare, et à la fois je remercie mon destin de me maintenir si loin d’eux. Mais là encore je culpabilise de penser ainsi. J’ai beau me dire que ce n’est pas contagieux, je redoute tout de même de sombrer dans une empathie douloureuse. J’ai du mal à maintenir mon affection pour eux et à la fois garder la tête froide pour les soutenir.

Ai-je le droit de leur souhaiter la mort de cette enfant dont les quatre membres sont atrophiés et dont le cerveau se contente uniquement de maintenir son corps en vie ? Oui, Ai-je le droit de souhaiter la mort de ce petit être dont le crâne entièrement soudé a dû être brisé pour laisser la place à son cerveau de croître ?

Peut-on encore s’estimer être une amie lorsqu’on a de telles pensées ?

Avec tout ça je prends une feuille, un crayon puis range le tout sans avoir même réussi à tracer le moindre mot.

Chers amis….
Mais ensuite ? Quoi dire ? oui, quoi dire ?

La rage monte en moi. Je m’en veux de ne plus connaître les mots qui auraient pu les réconforter. Ils sont si différents de mes souvenirs !

Dans une autre contrée
Dans un autre temps
Je vous aurais parlé
Ceci librement

Hélas de votre chair
Cette enfant est venue
Sachez amis très chers
Que votre cri j’ai entendu

Heureux malheur
La distance entre nous
Car hélas oui j’ai peur
De sombrer avec vous

Saurez vous me pardonner
De garder le silence
Malgré toute la confiance
Que vous m’aurez donné

Je ne veux tourner la page
Mais même si je le voulais
Je ne peux vous donner le gage
Qu’un jour je reviendrai

Thierry et Anne-Marie je suis de tout cœur avec vous.