Les informations visibles sur un compte Facebook ont des effets sur le processus d'embauche, confirme une étude française publiée par le Munich Personal RePEc Archive (MPRA) et rapportée dans Le Monde.

Pendant un an, Nicolas Soulié et ses collègues (1) de l’Université Paris-Sud, ont envoyé 837 candidatures au nom de 4 candidats fictifs, répondant à des postes de comptables dans la région parisienne référencés dans la base de données de Pôle emploi. Les candidats ont postulé d’une manière identique. Leur curriculum vitæ (CV) et leur lettre de motivation, bien qu’adaptés à l’entreprise concernée, présentaient des caractéristiques similaires.

La seule différence entre eux ne pouvait être remarquée qu'en consultant leurs faux profils Facebook. Ces derniers affichaient, de manière publique, les mêmes photos et la même allure, avec, cependant, une variation en ce qui concerne l’origine et les langues pratiquées. Des études ont déjà montré que les personnes d’origine étrangère connaissent, à compétences égales, une discrimination à l’emploi, précise Nicolas Soulié.

La première vague de tests a été effectuée avec les candidatures de Thomas Marvaux (né à Brive-la-Gaillarde et parlant italien) et Stéphane Marcueil (né à Marrakech et parlant arabe). Sur 230 candidatures envoyées, Thomas Marvaux a obtenu 49 (21.3%) réponses positives (invitant à prolonger le processus d’embauche) comparativement à 31 (13,4 %) sur 232 pour Stéphane Marcueil.

La deuxième vague de tests, avec les candidatures de Julien Bautrant (né à Brive-la-Gaillarde et parlant italien) et de Nicolas Bautrant (né à Marrakech et parlant arabe), a coïncidé avec un changement dans la présentation des profils Facebook. Avant ce changement, les résultats correspondaient à ceux de la première phase: 16 % de réponses positives pour Julien Bautrant comparativement à 7,1 % pour Nicolas Bautrant. Après, les résultats se sont renversés : le premier a reçu 8,3 % de réponses positives contre 13 % pour le second.

Avec ces nouveaux profils, le signal le plus important de cette expérience (la langue parlée) a été relégué dans une autre section, moins visible au premier coup d’œil. "La langue parlée est un élément central du processus de discrimination: si vous parlez une langue étrangère, cela veut dire que vous appartenez vraiment à la culture d’un autre pays, et cela peut être considéré comme une information négative", avance Matthieu Manant, coauteur, pour expliquer l’effet de la nouvelle configuration.

Un profil Facebook est consulté, concluent les chercheurs. "Mais ce n’est pas forcément négatif, il suffit d’apprendre à s’en servir : on peut d’abord nettoyer les informations sensibles, ou les rendre inaccessibles au grand public, mais aussi en jouer et afficher des éléments pouvant être considérés positivement par un recruteur", conseille Nicolas Soulié.

Illustration : Profil utilisé dans cette étude.

(1) Matthieu Manant et Serge Pajak.

Psychomédia avec sources: Le Monde, MPRA
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