"Bien que plusieurs théories de la déviance sexuelle intègrent la notion de fantasmes atypiques (paraphilies), la littérature scientifique ne décrit pas ce que représente concrètement ce type de fantasme", soulignent les auteurs d'une étude québécoise publiée dans le Journal of Sexual Medicine.

"La 5e édition du Manuel statistique et diagnostique des troubles mentaux (DSM-5) réfère à des fantasmes « anormaux », alors que l’Organisation mondiale de la santé parle de fantasmes « inhabituels » pour définir les paraphilies".

"Cliniquement, on sait bien ce qu’est un fantasme sexuel pathologique : il implique des partenaires non consentants, il induit une souffrance ou encore il est absolument nécessaire pour obtenir satisfaction", indique Christian Joyal du département de psychologie de l'Université de Trois-Rivière qui a mené cette étude avec ses collègues (1). "Mais à part cela, qu'est-ce qu'un fantasme anormal ou atypique au juste? Pour le savoir, nous avons demandé à des gens de la population générale, aussi simple que ça!, explique-t-il.

"Notre principal objectif était de spécifier la norme en matière de fantasmes sexuels, étape essentielle aux définitions de pathologie".

1517 adultes (718 hommes et 799 femmes; âge moyen de 30 ans) québécois ont répondu par Internet à un questionnaire concernant 55 fantasmes sexuels, et ont aussi décrit en détail leur fantasme favori. Chaque fantasme était ensuite catégorisé comme rare (2.3% ou moins des participants), inhabituel (15.9% ou moins), commun (plus de 50%), ou typique (plus de 84.1%).

Sur les 55 fantasmes étudiés, 2 seulement étaient rares chez les femmes ou les hommes et 9 étaient inhabituels; 30 étaient communs chez les hommes ou chez les femmes et seulement 5 étaient typiques. Ces résultats sont confirmés par l'analyse des fantasmes favoris.

Les thèmes de soumission et de domination étaient communs pour les hommes et pour les femmes.

Des fantasmes typiques sont, par exemples, d'avoir des relations sexuelles dans un endroit romantique (féminin); recevoir du sexe oral ou avoir une relation avec deux femmes (masculin).

Des fantasmes inhabituels sont, par exemples, ceux d'uriner sur son partenaire sexuel; porter des vêtements du sexe opposé; avoir une relation avec un prostitué; abuser d’une personne en état d'ébriété…

Les hommes avaient plus de fantasmes et les rapportaient avec une plus grande intensité que les femmes.

Les femmes, en général, souhaitent moins réaliser leurs fantasmes que les hommes. Ainsi, plusieurs d'entre elles qui expriment des fantasmes de soumission plus extrêmes (ex. : se faire prendre par un inconnu dominant) ne souhaitent pas qu’ils se réalisent. Tandis que les hommes, en majorité, aimeraient réaliser leur fantasme (ex. : triolisme).

La présence du partenaire amoureux est significativement plus grande dans les fantasmes féminins que masculins. De façon générale, les hommes en couple fantasment beaucoup plus sur des relations extraconjugales que les femmes en couple.

Ces résultats permettent d’élucider quelques phénomènes sociaux, tels que la popularité sans précédent du livre Cinquante nuances de Grey, souligne le chercheur.

(1) Amélie Cossette et Vanessa Lapierre

Psychomédia avec sources: Institut universitaire en santé mentale de Montréal, The Journal of Sexual Medicine
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