Une étude menée par des chercheurs en psychologie sociale, publiée en janvier dans la revue Nature Communications, identifie une raison pour laquelle les gens réagissent différemment aux disparités économiques.

Des recherches précédentes ont montré que les humains et certains autres primates ont développé, au cours de l'évolution, une aversion envers l'inégalité dans la distribution des biens et des ressources.

Par exemple, il a été constaté que des enfants, de six ans seulement, refusaient des objets si cela signifiait d'en avoir plus que leurs pairs.

« Les gens ont généralement une aversion pour les répartitions inégales des ressources ; par exemple ils n'aiment pas voir que des personnes sont sans abri ou n'ont pas accès aux produits de première nécessité, aux soins de santé et à l'éducation », souligne Shahrzad Goudarzi du département de psychologie de l'université de New York.

« Pourtant, plusieurs prêtent peu d'attention à l'augmentation des disparités économiques ou ne sont pas préoccupés par celles-ci. »

Par exemple, un sondage Gallup de 2018 a montré qu'un tiers des Américains sont satisfaits de la répartition actuelle des revenus et des richesses. Une telle acceptation, en dépit des préférences générales pour une plus grande égalité, amène à se demander comment les gens gèrent ces contradictions.

La présente étude, estiment les chercheurs, offre un début d'explication : les gens qui ont des croyances qui légitiment et justifient le système économique sont moins troublés par la pauvreté et la richesse extrêmes. Leurs croyances diminuent l'aversion profonde pour l'inégalité, les mettant à l'abri des émotions négatives en réaction à celle-ci. (Théorie de la justification du système)

Goudarzi et ses collègues (1) ont mené une série de six expériences. Les deux premières ont été réalisées avec des participants recrutés en ligne et les quatre autres avec des étudiants de premier cycle universitaire.

Dans les deux premières, les participants étaient invités à donner leur avis sur le système économique américain en indiquant leur accord avec des déclarations telles que : « Les positions économiques des gens sont le reflet légitime de leurs réalisations » et « Si les gens travaillent dur, ils obtiennent presque toujours ce qu'ils veulent ». (Les gens surestiment les possibilités d'ascension sociale)

Une semaine plus tard, certains ont visionné une vidéo dans laquelle un sans-abri décrivait sa situation, racontant ses routines et ses difficultés. Des groupes de contrôle ont visionné des vidéos banales, illustrant des interviews sur la pêche et la production de café. Ceux qui croyaient que le système économique américain est juste, légitime et justifié rapportaient moins d'émotions négatives après avoir regardé la vidéo portantsur le sans-abri que ceux qui ne croyaient pas que le système est juste.

Les études 3 à 5 ont reproduit ces étapes en ajoutant une nouvelle composante : des réponses physiologiques étaient mesurées (niveau de conductance de la peau et mouvements subtils des muscles faciaux), afin de saisir les réactions involontaires. Les participants qui avaient tendance à justifier le système économique ont montré des niveaux comparativement faibles d'affects négatifs et d'activation en regardant la vidéo portant sur la personne sans domicile.

L'étude 6 visait à capturer les émotions dans le contexte de la vie quotidienne. Des étudiants recevaient quatre messages textuels par jour, pendant neuf jours, les incitant à répondre à une courte enquête. Deux des enquêtes étaient conçues pour mesurer les réactions aux inégalités, l'une demandant aux participants d'indiquer s'ils avaient rencontré quelqu'un qu'ils considéraient comme très pauvre et l'autre s'ils avaient rencontré quelqu'un de très riche par rapport à eux-mêmes. Que les participants aient ou non signalé une telle rencontre, ils étaient interrogés sur leurs émotions - soit à la lumière de la rencontre (si une telle rencontre a été signalée), soit au cours des deux heures précédentes (si aucune rencontre n'a été signalée).

Conformément aux études précédentes, les personnes identifiées comme « justifiant le système » ont fait état de moins d'émotions négatives après leur exposition quotidienne à des personnes riches et pauvres comparativement à celles qui étaient plus critiques à l'égard du système économique.

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

(1) Ruthie Pliskin, John T. Jost et Eric D. Knowles.

Psychomédia avec sources : New York University, Nature Communications.
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