Une chirurgie du cœur comporte moins de risque de complications si elle est réalisée l'après-midi plutôt que l'avant-midi, selon une étude française publiée dans The Lancet. Ce qui s'explique par des mécanismes de l'horloge biologique du cœur.

Le rythme biologique de 24 heures de l'organisme est le fruit de l’interaction entre une horloge centrale cérébrale et d’horloges périphériques localisées dans chaque organe (cœur, foie, muscles...), rappellent les chercheurs.

Le communiqué des chercheurs explique :

« Privées d'oxygène, les cellules musculaires du cœur meurent rapidement sur une zone plus ou moins étendue. Cela entraîne des problèmes de contraction du muscle cardiaque, le myocarde, se manifestant par des troubles du rythme, une insuffisance cardiaque. Actuellement, la seule solution thérapeutique est de rétablir le plus rapidement possible un apport suffisant en oxygène : la “reperfusion”. Celle-ci diminue la mortalité et les complications associées à cette privation d'oxygène, c'est-à-dire l'ischémie.

L'ischémie myocardique concerne non seulement les patients qui développent un infarctus du myocarde, mais également ceux devant subir une chirurgie cardiaque (remplacement d'une valve cardiaque et/ou pontage coronarien). En effet, le chirurgien doit arrêter le cœur et l'exclure de la circulation sanguine pour pouvoir réaliser le geste opératoire. Il réalise pour cela un clampage aortique qui, de fait, impose au myocarde une séquence d'ischémie-reperfusion. »

Dans une première étude, les Prs David Montaigne et Bart Staels ont, avec leurs collègues (Institut Pasteur de Lille / CHU de Lille / Université de Lille / Inserm), suivi 596 patients opérés à cœur ouvert au CHU de Lille (298 le matin, 298 l'après-midi). Ceux opérés l'après-midi avaient une plus grande tolérance à l'ischémie (privation en oxygène) imposée au cœur pendant la chirurgie. Ils avaient deux fois moins de risque de complications juste après l'opération (9,4 % contre 18,1 %).

Dans une deuxième étude, les chercheurs ont réalisé un essai randomisé dans lequel 88 patients ont été assignés au hasard à être opéré le matin ou l'après-midi. Encore une fois, « la chirurgie l’après-midi assurait une certaine protection et une meilleure récupération », écrivent les auteurs.

Ils ont aussi procédé à une analyse génétique de biopsies de muscle cardiaque prélevé chez 14 patients ayant subi leur chirurgie le matin et 16 patients ayant été opérés l’après-midi. L’expression de 287 gènes différait selon le moment de la journée où le prélèvement avait eu lieu.

Chez la souris, les chercheurs ont observé qu'une protéine, Rev-Erbα, impliquée dans les mécanismes de l'horloge biologique présente dans les cellules du cœur, est présente en plus grande quantité le matin. En décalant cette horloge par la suppression de l'activité de la protéine, la susceptibilité à l'ischémie était diminuée le matin.

« La physiologie cardio-vasculaire (fréquence cardiaque, tension artérielle), expliquent les chercheurs, est bien connue pour être rythmée sur un cycle de 24 h. De la même manière, le risque de survenue d'un accident cardiovasculaire est connu pour être rythmé par le moment de la journée : la majorité des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux surviennent ainsi en fin de nuit ou au petit matin. Le cœur pourrait être ainsi plus ou moins sensible à certains stress, substance toxique ou médicament au cours du cycle de 24 heures. »

Ces découvertes « ouvrent une nouvelle voie thérapeutique dans la prise en charge des pathologies pour lesquelles l'ischémie du muscle cardiaque est centrale (angine de poitrine et infarctus du myocarde) mais également dans les situations où une ischémie est imposée par l'arrêt du cœur durant les chirurgies cardiaques et le transport du greffon avant transplantation cardiaque ».

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources : The Lancet, Institut Pasteur de Lille, Le Devoir.
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