Dans le contexte de la guerre en Ukraine, les médias ont rapporté une ruée des consommateurs français dans les pharmacies pour se procurer des comprimés d’iode stable (iodure de potassium) afin de se protéger des risques d'éventuelles radiations nucléaires, en vain car ce médicament n'est pas accessible dans les pharmacies.

Quels sont les risques de santé liés à l’iode radioactif ? Qu’est-ce que l’iodure de potassium (iode stable) et quel est son mode d'action ? Le Canal Détox de l'Inserm fait le point dans un article rédigé avec le soutien de Nicolas Foray (Inserm) et Michel Bourguignon (Université Paris Saclay).

« Un accident nucléaire, comme par exemple à Tchernobyl ou à Fukushima, est associé à plusieurs effets délétères sur la santé, liés aux particules et aux rayonnements émis ainsi qu’à plusieurs produits de fission majeurs qui se dégagent dans l’atmosphère et notamment l’iode 131. »

La thyroïde est le seul organe qui fixe l’iode. La fixation de l'iode radioactif peut causer des cancers de cet organe.

L’objectif de la prise d'iode stable est de « saturer » la thyroïde afin qu’elle ne puisse plus absorber des quantités supplémentaires d’iode – qu’il soit stable ou radioactif.

« Pour être efficace, cette saturation doit se faire rapidement, de façon massive et en respectant la posologie détaillée dans le tableau suivant » :

Les comprimés, fabriqués en France par la Pharmacie Centrale des Armées, sont dosés à 65 mg (50 mg d’iode).

Posologie pour les comprimés de 65 mg :

  • « Adultes (seulement si recommandé) et enfants de plus de 12 ans : 2 comprimés.
  • Enfants de 3 à 12 ans : 1 comprimé.
  • Enfants de 1 mois à moins de 3 ans : ½ comprimé, peut être dissous si besoin dans eau, lait, jus de fruit.
  • Nouveau-nés (moins que 1 mois) : 16 mg d’iodure de potassium soit 1/4 de comprimé. »

« La prise d’un seul comprimé d’iodure de potassium représente un apport de 50 mg d’iode, soit plus de 500 fois les besoins quotidiens de la thyroïde (l’OMS recommande un apport journalier de 90 µg jusqu’à 5 ans, 120 µg de 6 à 12 ans, de 150 µg pour les 13 ans et plus et de 250 µg pour les femmes enceintes et allaitantes). »

Les cancers de la thyroïde sont beaucoup plus fréquents chez les enfants dont la glande est en développement rapide. « Peu de cancers de la thyroïde se manifestent chez les adultes. Lorsque c’est le cas, le taux de mortalité demeure généralement faible. »

« La protection de la thyroïde par la saturation en iode stable avec un comprimé n’aurait réellement un intérêt que pour les enfants et les adultes jeunes pour qui le risque de cancer est plus élevé, et encore, dans un laps de temps spécifique. En effet, la prise de ces comprimés ne serait efficace qu’entre 1 à 2 h avant l’émission radioactive et jusqu’à quelques heures après. L’administration pourrait être répétée en cas d’exposition prolongée aux iodes radioactifs sur recommandation des autorités.

Pour les adultes après l’âge de 40 ans, les conséquences potentiellement délétères d’une saturation massive en iode stable de la thyroïde dépassent les bénéfices. En effet, elle peut conduire à une dérégulation de l’organe et de sa production d’hormones. Par exemple, en rendant la thyroïde hyperactive (hyperthyroïdie), des troubles de la fréquence cardiaque et de la tension artérielle peuvent survenir ainsi que des excès d’angoisse ou des bouffées de chaleur. Mais paradoxalement, un excès d’iode sur le long terme peut aussi produire une baisse d’activité de la thyroïde (hypothyroïdie) avec une baisse des fonctions vitales avec une prise de poids, une altération de la peau et des troubles de la mémoire. »

« Notons enfin que dans le cas d’une explosion atomique, la quantité d’iode radioactif émise étant très inférieure par rapport à un accident de centrale nucléaire, le bénéfice d’une prise de comprimé d’iode reste négligeable. »

Plus d'informations sur le site de l'Inserm : Des comprimés d’iode pour se protéger des radiations, vraiment ?

Mentionnons que l'iode stable (iodure de potassium) n'est pas délivré en pharmacie sur simple demande. Voyez l'article suivant sur Psychomédia pour plus d'informations : Nucléaire et iode : tout savoir sur ce médicament.

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