Les associations Osez le féminisme, La Barbe et Paroles de Femmes ont lancé vendredi une pétition intitulée "Sexisme : ils se lâchent, les femmes trinquent". Elles organisent également un rassemblement contre le sexisme à Paris (au pied de Beaubourg, à 17H), dimanche le 22 mai.

Dans le contexte de l'"effervescence médiatique sans précédent" autour de l’inculpation pour agression sexuelle et tentative de viol de Dominique Strauss-Kahn, les associations s’inquiètent du déferlement de propos tenus par des personnalités publiques qui font apparaître une confusion intolérable entre liberté sexuelle et violence faite aux femmes. Elles font référence plus largement à des déclarations invoquant le penchant supposé de Dominique Strauss-Kahn pour les "conquêtes féminines". Le viol et la tentative de viol sont des crimes, rappellent-elles.

Plusieurs associations (1) soutiennent également l'appel. Plus de 6000 personnes l'avaient déjà signé samedi dont plusieurs personnalités (2).

Depuis le début de l'affaire DSK, "nous sommes abasourdies par le déferlement quotidien de propos misogynes tenus par des personnalités publiques", peut-on lire dans le texte de la pétition. "Nous avons eu droit à un florilège de remarques sexistes", du "il n'y a pas mort d'homme" (du socialiste Jack Lang) au "troussage de domestique" et à «une imprudence» (du journaliste Jean-François Kahn) en passant par une «tartufferie» (Bernard-Henri Lévy) et "c'est un tort d'aimer les femmes ? Ces propos tendent à minimiser la gravité du viol, veulent-elles sensibiliser. Ils "illustrent l'impunité qui règne dans notre pays quant à l'expression publique d'un sexisme décomplexé. Autant de tolérance ne serait acceptée dans nul autre cas de discrimination."

Plusieurs autres voix se sont élevées cette semaine. Par exemple, selon Me Fatouma Metmati, avocate pénaliste à Paris, dont les propos sont rapportés par France Soir: « En France, les hommes politiques et les puissants ont un traitement de faveur devant la justice, une immunité de fait, surtout pour des affaires de ce genre. Les femmes violées par des hommes de pouvoir ou des policiers ne sont pas prises au sérieux et n'ont aucune chance qu'il y ait des suites. Ce qui se passe aux Etats-Unis avec DSK n'avait aucune chance de se produire en France », dit-elle. « La justice américaine n'est pas parfaite, mais elle est exemplaire sur ce point et c'est la même pour tous les citoyens. C'est une belle leçon donnée à la France », dit-elle.

Avec les voix qui se sont fait entendre, les personnalités qui ont utilisé des expressions sexistes s’en mordent les doigts et s’excusent, comme le commente Libération. Tant les politiques que les média se sont rendus compte qu’ils ne peuvent plus se permettre de ne parler que de la présomption d’innocence. Comme l'a rappelé le Collectif national pour les droits des femmes dans un communiqué, la jeune femme, elle, «a droit à la présomption de victime.

«Cette affaire peut constituer un tournant et une chance à saisir pour le féminisme. C’est l’occasion de poser des marqueurs, et des limites dans le débat public», pense Alice Coffin, militante à La barbe (Libération).

(1) Planning Familial, Choisir la Cause des Femmes, la CLEF, Mix-Cité, l'inter-LGBT, le Laboratoire de l'Egalité, les Chiennes de Garde, la Maison des Femmes de Montreuil, Le Collectif de Pratiques et de Réflexions Féministes « Ruptures », le Réseau Féministe « Ruptures », Bagdam Espace lesbien, SOS Les mamans, Association la Lune, l'ANEF, l'Espace Simone de Beauvoir, La Ligue du Droit International des Femmes

(2)Audrey Pulvar, Florence Foresti, Gisèle Halimi, Clémentine Autain, Françoise Héritier, Virginie Despentes, Christine Ockrent, Florence Montreynaud, Isabelle Alonso, Marie-Françoise Colombani, Agnès Bihl, Annie Ernaux, Geneviève Fraisse, Julien Bayou, Patric Jean, Dominique Méda, Annick Coupé, Caroline Mecary, Giulia Foïs...

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