Dans un article publié dans la revue Archives of Internal Medicine, 9 cardiologues et chercheurs dont Michel de Lorgeril (CNRS, Grenoble) et John Abramson (Université Harvard, Boston) relèvent de graves biais dans l’étude Jupiter qui avait conclu à l’intérêt d’un médicament anti-cholestérol de la classe des statines chez des personnes exemptes de maladie coronarienne et sans cholestérol élevé.
Publiée dans le même numéro de la revue, une étude montre que ces médicaments ne semblent pas avoir d'effet préventif, du moins à court terme, pour réduire la mortalité de toute cause chez des personnes ayant un cholestérol élevé mais aucun antécédent cardiaque.

Publiée en 2008, l’étude Jupiter, financée par les laboratoires AstraZeneca, a été présentée comme la preuve qu'un traitement anti-cholestérol avec des médicaments de la classe des statines pouvait être bénéfique pour des personnes en bonne santé.

De Lorgeril et coll. dénoncent de graves biais dans la conduite de cette étude et dans l’interprétation de ses résultats, rapporte La Nutrition.fr. Ces biais discréditent totalement, selon eux, ses conclusions et remettent en cause l’intérêt de proposer ces médicaments à des millions de personnes sans cholestérol élevé.

Plus de 18 000 personnes avaient été sélectionnées sur la base d'un taux de cholestérol "normal" ou bas, mais avec un indicateur d'inflammation (CRP) supérieur à la normale. Un traitement par rosuvastatine (Crestor) était comparé à un placebo. La conclusion était qu’il fallait initier un traitement de rosuvastatine à tout individu ayant une CRP élevée, même avec un cholestérol normal ou bas.

De Lorgeril et coll. relèvent que les chiffres de mortalité ne sont pas indiqués dans l’étude. Le lecteur doit les calculer lui-même et ne peut conclure qu’à une absence d’effet puisqu’il y a 12 décès par infarctus ou accident vasculaire cérébral dans chacun des 2 groupes. Ils dénoncent aussi un manque de cohérence des chiffres de mortalité dans l'étude avec les données épidémiologiques et l'arrêt prématuré de l'étude susceptibles d'accentuer certains biais.

Ils dénoncent enfin les nombreux conflits d'intérêt : l'étude a été conduite par des employés du laboratoire AstraZeneca; 9 des 14 coauteurs ont des liens financiers avec le laboratoire et la majorité des membres des comités censés “surveiller” les aspects méthodologiques et éthiques de l’étude ont des liens avec l’industrie pharmaceutique; le principal auteur est lui-même co-détenteur du brevet du dosage de la CRP, le test biologique qui identifie les personnes en bonne santé qui devraient se voir prescrire une statine.

Un autre article de la revue présente une étude britannique qui montre que ces médicaments ne semblent pas avoir d'effet préventif, du moins à court terme, pour réduire la mortalité de toute cause chez des personnes ayant un cholestérol élevé mais aucun antécédent cardiaque.

Psychomédia avec sources: La Nutrition, Le Point.
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