En s’intéressant à une famille méconnue de protéines présentes dans le cerveau, des chercheurs français, dont les travaux sont publiés dans la revue Molecular Psychiatry, ont développé un candidat-médicament d'une nouvelle classe pour le traitement de la dépression.

Bien que les premiers antidépresseurs aient été découverts il y a 65 ans, « les traitements actuels, notamment des inhibiteurs de recapture de la sérotonine, un neurotransmetteur impliqué dans l’humeur, ont des délais d’action longs et une efficacité variable », explique le communiqué de l'Inserm.

« Environ 30 % des patients ne répondent pas de manière satisfaisante aux traitements et souffrent de dépression dite “résistante”. »

Ces travaux ont été réalisés par Sophie Gautron et son équipe du laboratoire Neuroscience Paris Seine, spécialisées en neurobiologie des maladies psychiatriques, qui ont uni leurs compétences à celles d’une équipe de chimie pharmaceutique à l’université Paris Descartes.

« Des études récentes ont montré qu’une famille peu connue de protéines présentes dans le cerveau, les “transporteurs de cations organiques” (OCT), jouait un rôle dans la régulation de l’humeur. “Nous avons donc fait l’hypothèse que ces transporteurs pouvaient être des cibles thérapeutiques, explique Sophie Gautron, et en collaboration avec Nicolas Pietranscosta de l’université Paris Descartes, nous avons utilisé une approche de modélisation 3D in silico [à l’aide d’algorithmes informatiques ; par analogie aux expressions in vivo et in vitro, ndlr.] pour développer un nouveau ligand des OCT.”  »

« Il a fallu ensuite optimiser cette molécule, en augmentant son affinité pour les OCT et sa capacité à diffuser dans le cerveau. Le composé synthétisé, une prodrogue, a été testé avec succès sur un modèle animal de dépression chronique, dans lequel les souris présentent des anomalies similaires aux symptômes des patients dépressifs : anxiété, troubles cognitifs, aversion sociale ou encore anhédonie, c’est-à-dire la perte du plaisir dans les activités quotidiennes. »

« Après administration de la prodrogue, les souris ont montré une nette diminution de tous les symptômes, aussi efficacement qu’avec l’antidépresseur de référence, la fluoxétine (Prozac), et même un effet accéléré à 11 jours sur l’anhédonie. “Nous avons observé que cette molécule agit sur l’activité des neurones dopaminergiques au sein d’une région du cerveau importante pour les processus de récompense et donc pour l’anhédonie”, décrit Sophie Gautron. »

Ces premiers résultats « apportent la preuve de concept que les transporteurs de cations organiques constituent des cibles thérapeutiques pertinentes pour les troubles de l’humeur », concluent les chercheurs.

Les équipes de recherche vont poursuivre leurs investigations afin d’optimiser la prodrogue synthétisée dans des études précliniques puis envisager des études cliniques chez l'humain. L'objectif à terme est de développer une nouvelle classe d’antidépresseurs.

Pour plus d'informations sur la dépression et sur les antidépresseurs, voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources : Inserm, Molecular Psychiatry.
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