Chez des souris porteuses d'une mutation génétique causant un vieillissement prématuré, la reprogrammation de « marques épigénétiques » dans le génome a réduit de nombreux signes de vieillissement et prolongé leur durée de vie en moyenne de 18 à 24 semaines, rapportent des chercheurs dans la revue Cell.

L'étude suggère que les changements épigénétiques sont à l'origine du vieillissement et qu'ils peuvent être malléables, explique Juan Carlos Izpisua Belmonte du Salk Institute (Californie), l'auteur principal.

Ces travaux, rapporte le New York Times, s'appuient sur ceux du biologiste japonais Shinya Yamanaka, prix Nobel 2012, qui a identifié quatre gènes permettant de reprogrammer le génome des cellules du corps telles que les cellules de la peau en cellules à l'état embryonnaire. Cette méthode est maintenant couramment utilisée pour changer les cellules de tissu adulte en cellules très semblables aux cellules souches embryonnaires produites dans les premières divisions d'un œuf fécondé (cellules souches pluripotentes induites, dites « iPS »).

Les efforts précédents pour produire un rajeunissement chez un animal en induisant l'expression des facteurs de Yamanaka dans toutes les cellules de l'organisme entraînaient la mort presque immédiate ou le développement de tumeurs.

Les chercheurs du Salk Institute ont utilisé une approche différente de reprogrammation partielle. La reprogrammation consiste à induire l'expression des quatre facteurs Yamanaka dans les cellules. Les facteurs doivent être exprimés pendant 2 à 3 semaines pour que les cellules atteignent la pluripotence.

La reprogrammation partielle consistait à induire l'expression des facteurs de Yamanaka pendant 2 à 4 jours seulement. Les cellules n'atteignent pas la pluripotence. Au contraire, une cellule qui commence comme une cellule de la peau reste une cellule de la peau. Mais les signes de dysfonctionnement associés à l'âge dans la cellule diminuent.

Les changements entraînés par cette reprogrammation sont le résultat d'un « remodelage épigénétique dans la cellule », explique Izpisua Belmonte. Les marques épigénétiques régulent et protègent le génome. Chaque cellule contient le génome entier et les marques épigénétiques activent les gènes pertinents pour chaque type de cellules (cellules cutanées, nerveuses, immunitaires…).

Une telle méthode ne peut être appliquée à l'humain mais il pourrait être possible, explique Juan Carlos Izpisua Belmonte, de développer de nouvelles stratégies de rajeunissement pour des tissus ou des organes spécifiques, comme la peau, les muscles ou le système cardio-vasculaire. Il imagine des crèmes ou des injections qui pourraient faire l’objet d’essais cliniques « d’ici une dizaine d’années ».

Le Français Jean-Marc Lemaître (Inserm) salue ces résultats « particulièrement intéressants », rapporte Le Monde. « En 2011, son équipe avait montré que les cellules de centenaires humains conservaient la capacité d’inverser les processus de sénescence, grâce à six facteurs, et non quatre comme chez Yamanaka. Mais là, “il y a un plus : on devient capable d’identifier les mécanismes mis en route" », lesquels pourraient « faire émerger “des cibles dans les cellules, qui pourraient être activées ou réprimées par de petites molécules”. »

Illustration: Courtesy of Juan Carlos Izpisua Belmonte Lab /Salk Institute.

Psychomédia avec sources : Cell Press, Le Monde, New York Times.
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