Utilisées pour combattre les poux, les huiles essentielles de lavande et d’arbre à thé pourraient agir comme perturbateurs endocriniens, met en garde le magazine 60 Millions de consommateurs de l'Institut national français de la consommation.

Depuis quelques années, une abondante offre de produits antipoux à base d’huiles essentielles s’est développée en pharmacie, que ce soit pour éradiquer les poux ou pour prévenir leur apparition.

Les fabricants utilisent surtout deux huiles essentielles : celle de lavande et celle d’arbre à thé (tea tree).

« Sur le Web, on trouve également une multitude de recettes artisanales antipoux à base de ces deux huiles essentielles. Une société a même mis au point un bandeau en tissu antipoux qui diffuse en continu, grâce à des microcapsules, de l’huile essentielle de lavande dans les cheveux. »

Le centre antipoison de Lille a publié en 2016 un bulletin d’information intitulé « Alerte : intoxications aux huiles essentielles », qui décrit trois cas de poussée mammaire anormale (« gynécomastie ») chez des jeunes garçons, rapporte « 60 Millions ». Ces symptômes pourraient être provoqués par « une éventuelle stimulation œstrogénique des composants de l’huile essentielle de lavande », estimaient les auteurs. L’arbre à thé est également suspecté.

Ce bulletin suggère que ces deux huiles essentielles pourraient – dans des circonstances qui restent à déterminer – mimer l’action d’hormones et ainsi agir comme des perturbateurs endocriniens.

Ces trois cas ne seraient pas isolés, selon l’Association française des pédiatres endocrinologues libéraux (AFPEL). « D’autres cas sont décrits dans la littérature scientifique et par des praticiens sur le terrain », indique la Dre Patricia Bartaire, membre fondatrice de l’association.

Le communiqué précise :

« Sollicitées par 60 Millions, ni la Répression des fraudes ni les principales agences sanitaires n’ont été en mesure de fournir des informations complémentaires.

Les services de l’Agence de sécurité sanitaire (Anses) indiquent toutefois mener des travaux sur la toxicité potentielle des huiles essentielles, fondés “en partie sur des données collectées par les centres antipoison”. Mais le caractère de “perturbateurs endocriniens potentiels” n'entre pas dans le champ de ces travaux qui se concentrent sur “les cas aigus”, précise une porte-parle de l’Agence à 60 Millions.

Les huiles essentielles sont utilisées comme des médicaments, des cosmétiques ou encore comme des compléments alimentaires. Mais au niveau réglementaire, elles ne rentrent pas forcément dans l’une de ces catégories. Par exemple, seulement trois médicaments contenant de l’huile essentielle de lavande sont répertoriés par l’Agence du médicament. Et aucun avec de l’huile essentielle d’arbre à thé. C’est la raison pour laquelle leur potentiel toxique reste peu étudié alors que leurs usages se banalisent.

Parmi les trop rares publications scientifiques qui ont étudié l’hypothèse de perturbations endocriniennes lors d’expositions aux huiles essentielles, la plus remarquée remonte à 2007. Elle a été publiée dans le New England Journal of Medicine, une revue scientifique américaine de référence. Comme dans le bulletin du centre antipoison de Lille, cette étude décrit, mais dans le détail cette fois, des poussées mammaires survenues chez trois garçons âgés de 4, 7 et 10 ans. Ces derniers utilisaient régulièrement des cosmétiques formulés avec des huiles essentielles de lavande et d’arbre à thé. Les symptômes ont régressé après que les enfants ont arrêté d’utiliser ces produits.

En complément de leurs observations, les chercheurs américains ont testé les effets des huiles essentielles de lavande et d’arbre à thé sur des lignées de cellules humaines sensibles aux hormones œstrogènes. Selon leurs conclusions, cette expérience met en évidence une activité qui se rapprocherait de celle des œstrogènes naturels. »

« Les autorités de santé doivent a minima informer la population des données scientifiques qui mettent en cause ces huiles essentielles d’usage très courant. Et, par principe de précaution, la question se pose aussi d’encadrer plus strictement les usages chez l’enfant et l’adolescent », conclut le magazine.

Psychomédia avec source : 60 Millions de consommateurs.
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