Les élites urbaines profitent de la plupart des bénéfices des effets d'agglomération que procurent les grandes villes, tandis que de larges pans de la population urbaine n'en retirent rien ou presque, montre une étude publiée en janvier 2023 dans la revue Nature Human Behaviour.

« Ces dernières années, des chercheurs de toutes disciplines ont identifié des relations frappantes et apparemment universelles entre la taille des villes et leur activité socio-économique », rapportent les auteurs.

« Plus les villes sont grandes, plus elles créent d'interconnexions, de richesses et d'inventions par habitant. Toutefois, ce qui est vrai pour les populations urbaines en moyenne ne l'est pas forcément pour les résidents individuels. »

« Les résultats économiques plus élevés des grandes villes dépendent essentiellement des résultats extrêmes de quelques personnes qui réussissent », conclut le communiqué des chercheurs.

« En ignorant cette dépendance, les décideurs politiques risquent de surestimer la stabilité de la croissance urbaine, notamment à la lumière de la grande mobilité spatiale des élites urbaines et de leur déplacement vers les endroits où se trouve l'argent », explique Marc Keuschnigg, professeur de sociologie aux universités de Linköping (Suède) et de Leipzig (Allemagne).

Keuschnigg et ses collègues (1) ont analysé des données géocodées sur les interactions sociales et la production économique en Suède, en Russie et aux États-Unis.

Ils ont suivi 1,4 million de salariés suédois dans le temps et ont constaté que ceux qui avaient initialement réussi dans les grandes villes étaient plus prospères que ceux qui avaient réussi dans les petites villes. En revanche, les individus typiques des petites et grandes villes ont connu des trajectoires salariales presque identiques.

Par conséquent, les individus ayant initialement réussi dans les grandes villes se sont de plus en plus éloignés de l'individu type de leur propre ville, créant ainsi une inégalité au sein des grandes villes, et des individus ayant le mieux réussi dans les petites villes, créant ainsi une inégalité entre les villes.

La productivité d'un individu dépend des environnements sociaux locaux dans lesquels il se trouve. En raison de la plus grande diversité dans les grandes villes, les personnes qualifiées et spécialisées ont plus de chances de trouver d'autres personnes dont les compétences sont complémentaires aux leurs. Les niveaux de productivité et les possibilités d'apprentissage sont donc plus élevés dans les grandes villes.

Cependant, tout le monde ne peut pas accéder aux environnements sociaux productifs qu'offrent les grandes villes. Les différents retours du contexte s'accumulent au fil du temps, ce qui donne lieu à d'importantes inégalités.

L'étude montre également que les personnes les mieux rémunérées sont plus susceptibles de quitter les petites villes que les grandes, et que ces personnes surperformantes ont tendance à s'installer dans les grandes villes. L'exode disproportionné des personnes les plus performantes des petites villes entraîne un processus de renforcement qui fait disparaître un grand nombre des personnes les plus prometteuses des régions moins peuplées tout en les ajoutant aux grandes villes.

Les plus grandes villes sont en effervescence parce qu'elles accueillent également les personnes les plus innovantes, les plus sociables et les plus compétentes. Ces dernières contribuent de manière disproportionnée à la production des villes, ce qui représente un processus « d'enrichissement » qui confère un avantage cumulatif aux plus grandes villes.

En ce qui concerne les inégalités urbaines, l'étude attire l'attention sur l'exclusion partielle de la plupart des citadins des avantages socio-économiques des villes en expansion. Leur mode de vie, différent de celui de l'élite urbaine, bénéficie moins de la situation géographique. Si l'on tient compte du coût de la vie dans les grandes villes, plusieurs de leurs habitants sont en fait moins bien lotis que des personnes similaires vivant dans des plus petites places.

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(1) Martin Arvidsson, Niclas Lovsjö.

Psychomédia avec sources : Linköping University, Nature Human Behavior.
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