Les personnes qui ont vécu un stress intense tel qu'un événement traumatisant présentent souvent une plus grande vulnérabilité face au stress subséquent qui les rend plus susceptibles de développer une dépression.

Des chercheurs français, dont les travaux sont publiés dans le Journal of Neuroscience, ont identifié un marqueur sanguin d'une telle vulnérabilité.

Jean-Jacques Benoliel et ses collègues de l'Inserm et du CNRS ont constaté, chez des rats soumis à un stress intense, que seuls ceux présentant une altération durable de la structure des neurones dans certaines régions du cerveau, en particulier dans l'hippocampe (une zone impliquée dans de nombreux processus d'apprentissage et de mémorisation) développaient des symptômes dépressifs à la suite d'un nouvel épisode de stress.

En même temps, le taux de BDNF (Brain-derived neurotrophic factor), une molécule impliquée dans la croissance des cellules, était fortement diminué dans cette région et dans le sang.

Après quelques semaines, la moitié des rongeurs stressés avaient retrouvé leur état normal, tandis que l'autre moitié avaient conservé les modifications neuronales et un faible taux de BDNF. A la suite d'un nouveau stress de plus faible intensité, les symptômes dépressifs ne sont apparus que dans ce second groupe.

Cette étude ouvre de nouvelles perspectives, estiment les chercheurs, visant à identifier, chez les personnes à risque, celles prédisposées à développer une dépression.

Des études ont déjà montré que, bien que la plupart des gens ne développent une dépression qu'en cas d'adversité importante, environ 30 % des personnes atteintes pour la première fois et 60 % de celles ayant des antécédents de dépression développent la maladie suite à des malheurs moins importants. Une étude publiée en juin dernier montrait que les antécédents de stress lié à une perte interpersonnelle entraînait une plus grande sensibilité que les autres formes de stress.

Une possibilité, disaient les chercheurs, est que les gens qui souffrent d'adversité et/ou de dépression tôt dans la vie développent des croyances négatives sur eux-mêmes ou sur le monde - des croyances qui sont activées en réaction aux situations stressantes ultérieures (selon une approche cognitive classique de la dépression). Une autre possibilité avancée, qui n'est pas mutuellement exclusive, est que l'adversité et la dépression précoces influencent les systèmes biologiques impliqués dans la dépression, peut-être en abaissant le seuil à partir duquel les processus tels que l'inflammation se déclenchent.