Le laboratoire pharmaceutique allemand Boehringer Ingelheim aurait tenté d'empêcher la divulgation des résultats d'une étude remettant en cause l'intérêt du médicament Pradaxa (dabigatran), révèle le New York Times relayé par Le Monde.

C'est ce qui ressort d'échanges de mails, rendus publics dans le cadre d'un procès intenté par des milliers de patients et leurs familles aux États-Unis.

Ce médicament, le premier des nouveaux anticoagulants oraux (NACO) lancé en 2010 est indiqué dans les cas de fibrillation auriculaire (le trouble le plus fréquent du rythme cardiaque) pour prévenir les risques d'accident vasculaire cérébral (AVC).

Un argument de vente mis de l'avant par Boehringer pour convaincre les autorités d'autoriser le médicament, malgré un intérêt médical limité et un prix élevé, est qu'il ne nécessiterait pas de contrôle sanguin de routine contrairement au traitement par l'antivitamine K Coumadine (warfarine).

L'étude, réalisée par le Dr Paul Reilly (chercheur interne chez Boehringer) et ses collègues, suggérait qu'un contrôle sanguin serait bénéfique à certains patients. Certains d'entre eux, ont-ils montré, absorbent trop peu le médicament pour prévenir efficacement l'AVC alors que d'autres l'absorbent trop et sont à risque plus élevé de saignement (alors qu'il n'y a pas encore d'antidote en cas d'hémorragie avec ce médicament).

La révélation de ces résultats, estimait la Dre Jutta Heinrich-Nols en charge du dossier Pradaxa dans un mail daté du 4 février 2013, "ruinerait tous les efforts que nous avons faits pour faire face à la concurrence des autres NACO".

Le Pradaxa, dont la vente depuis 2010 a rapporté plus de 2 milliards de dollars, doit affronter depuis 2011 la concurrence du Xarelto (rivaroxaban) de l'allemand Bayer, et, depuis 2013, de l'Eliquis (apixaban) des américains BMS et Pfizer.

Mentionnée dès décembre 2011 dans d'autres mails, l'étude vient d'être publiée dans le numéro de février 2014 du Journal of the American College of Cardiology (JACC). Alors que plusieurs conclusions de la version préliminaire sont demeurées, les références à un niveau sanguin optimal n'apparaissent pas dans l'article.

De 2010 à la fin de 2012, le Pradaxa a été cité dans plus de 1000 décès rapportés à l'agence américaine du médicament (FDA), indique Thomas J. Moore de l'Institute for Safe Medication Practices qui assure le suivi des rapports de sécurité soumis à la FDA. Il évalue les anticoagulants, incluant la Coumadine et le Pradaxa, comme étant le problème de sécurité le plus grave en 2011 et 2012.

Les anticoagulants Eliquis, Pradaxa et Xarelto ne doivent être prescrits qu'en deuxième choix

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources: New York Times, Le Monde, JACC
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