Les tribunaux ne dépistent pas correctement les tests psychologiques peu fiables, avec pour conséquence que de la pseudoscience est souvent utilisée comme preuve, selon une étude publiée en février dans la revue Psychological Science in the Public Interest.

« L'étude montre que de nombreux tests utilisés par les psychologues dans la pratique médico-légale sont solides, mais ils ne sont pas tous généralement reconnus ou évalués comme ayant des qualités psychométriques élevées. »

Un tiers des tests psychologiques utilisés dans les procédures judiciaires américaines ne sont pas généralement acceptés par les experts, indique l'étude.

« Un clinicien a la liberté d'utiliser l'instrument qu'il veut et c'est le Far West », a déclaré l'auteure principale, Tess Neal professeure de psychologie à l'Université d'État de l'Arizona, au site New Scientist.

Le problème n'est pas limité aux États-Unis. Il existe également des inquiétudes au Royaume-Uni, a indiqué Robert Forde, auteur du livre Bad Psychology : How forensic psychology left science behind, relayé par le magazine New Scientist. En France, une pétition signée par 1200 professionnels de santé réclame l'exclusion des professionnels d'approche psychanalytique en raison du manque de validité de leurs évaluations.

L'étude de Neal s'est d'abord penchée sur 364 tests psychologiques couramment utilisés dans les tribunaux américains selon 22 enquêtes précédentes menées auprès de professionnels de la santé mentale experts en évaluation médico-légale. Ces tests sont utilisés dans une vaste gamme de cas, allant de la garde parentale à la détermination de l'état d'esprit ou l'aptitude d'une personne.

Près de 60 % des tests utilisés n'avaient pas reçu d'avis généralement favorable quant à leur validité scientifique dans des manuels de référence largement acceptés tels que le Mental Measurements Yearbook. Et 33 % n'étaient généralement pas acceptés par les experts en psychologie, selon neuf études publiées précédemment dans ce domaine.

L'équipe a ensuite consulté une base de données juridique de 876 causes portées devant les tribunaux fédéraux et d'États américains de 2016 à 2018 et a constaté que le test psychologique le plus couramment utilisé était le Minnesota Multiphasic Personality Inventory (MMPI), dont les critiques sont généralement positives dans la littérature professionnelle.

Le deuxième plus couramment utilisé était le test de Rorschach, un test projectif publié en 1921 et utilisé dans le cadre d'une approche psychanalytique, qui demande aux gens quelles images ils voient dans des schémas abstraits (les fameuses taches d'encre). Ce test a été largement critiqué parce qu'il laisse les cliniciens interpréter les réponses en fonction de leurs propres impressions sur une personne. « Il y a des questions sur ses fondements scientifiques », indique Neal. (Qu'est-ce que le Test de Rorschach)

Les tests les plus problématiques sont généralement ceux qui sont trop subjectifs, explique-t-elle.

L'étude montre que les tests psychologiques ne sont contestés devant les tribunaux que dans 5 % des cas, et que ces contestations ne réussissent qu'un tiers du temps.

« Les instruments les plus suspects sur le plan scientifique ne sont pratiquement jamais remis en question », résume-t-elle. « Les avocats contestent rarement les expertises psychologiques, et lorsqu'ils le font, les juges manquent souvent à leur devoir d'examen minutieux requis par la loi. »

Neal et ses collègues offrent des conseils concrets pour résoudre ces problèmes, aux psychologues aux praticiens de la santé mentale, aux avocats, aux juges et aux membres du public qui interagissent avec les psychologues dans le système juridique.

« Nous suggérons qu'avant d'utiliser un test psychologique dans un cadre juridique, les psychologues s'assurent que ses études de validation psychométriques et contextuelles ont survécu à un examen scientifique par des pairs dans une revue universitaire », explique Neal. « Pour les avocats et les juges, les méthodes des témoins experts des psychologues peuvent et doivent être examinées, et nous donnons des suggestions spécifiques sur la manière de le faire. »

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

(1) Christopher Slobogin, David Faigman, Kurt F. Geisinger.

Psychomédia avec sources : Psychological Science in the Public Interest, Association for Psychological Science, Arizona State University, New Scientist.
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