Parmi les facteurs contribuant à l'hésitation à se faire vacciner, les préoccupations concernant la sécurité des vaccins et les effets indésirables jouent le rôle principal.

Des biais cognitifs jouent aussi un rôle important pour relier ces préoccupations aux comportements d'hésitation vaccinale. (Qu'est-ce qu'un biais cognitif ?)

Afin d'aider les intervenants à répondre à l'hésitation vaccinale, des chercheurs de l'Université Concordia (Montréal, Québec) ont réalisé une analyse de la littérature scientifique avec les objectifs 1) de déterminer quelles sont les réponses apportées par les études aux préoccupations concernant la sécurité des vaccins et leurs effets secondaires indésirables, et 2) d'analyser les biais cognitifs qui interviennent dans l'hésitation vaccinale. Leur analyse a été publiée en septembre 2021 dans la revue BMC Public Health.

Hossein Azarpanah et ses collègues (1) ont recensé 15 biais cognitifs susceptibles d'intervenir dans le processus de prise de décision concernant les vaccins et pousser à hésiter à se faire vacciner.

Ils ont classé ces biais en trois groupes.

Les biais cognitifs liés au traitement des informations sur les vaccins
Effet de cadrage

Se produit lorsque la manière dont un message est formulé affecte le choix d'une personne. Par ex., cadrer négativement les résultats d'un vaccin en mettant l'accent sur la plus petite partie des patients présentant des effets indésirables par rapport à la plupart des patients ne présentant aucun effet indésirable.

Négligence du taux de base

Tendance à se concentrer sur des informations spécifiques et à ignorer des informations générales, même si ces dernières sont plus importantes. Par ex., surestimation des cas rares d'effets secondaires suivant la vaccination et sous-estimer les cas légers courants.

Biais de disponibilité

Tendance à accorder une plus grande importance aux facteurs qui sont plus faciles à se rappeler. Par ex., la couverture médiatique d'un rapport d'effet secondaire rare offre un message vivide et émotionnellement convaincant, susceptible d'être rappelé lors de la prise de décision sur la vaccination.

Effet d'ancrage

Tendance à se fier plus fortement à une information présentée initialement qu'ultérieurement lors de la prise de décision. Par ex., avoir vu un effet secondaire grave à la suite d'un vaccin et croire que les effets secondaires graves sont plus fréquents avec ce vaccin spécifique.

Biais d'autorité

Tendance à accorder plus de poids à l'opinion de personnes en position d'autorité. Par ex., en tant que figure d'autorité, lorsqu'un professionnel de la santé diffuse du contenu anti-vaccination, cela peut inciter les gens à s'opposer à la vaccination.

Les biais cognitifs liés à la prise de décision sur la vaccination
Biais d'omission

Tendance à considérer les résultats de l'absence d'action (omission) comme moins graves que ceux de l'action (commission), même si le résultat de l'absence d'action est plus grave ou égal à celui de l'action. Par ex., les parents considèrent la vaccination comme une action de commission, et lorsqu'ils anticipent des effets indésirables suivant la vaccination, ils ont tendance à omettre (ne pas vacciner).

Aversion pour l'ambiguïté

Tendance à prendre un risque connu plutôt qu'un risque inconnu, quels que soient les résultats. Par ex., les gens préfèrent un risque connu lié à une maladie plutôt qu'un risque plus ambigu lié à un vaccin contre la même maladie.

Aversion pour les pertes

Tendance à accorder plus d'importance à l'évitement des pertes qu'à l'obtention de gains comparables. Par ex., lorsqu'ils décrivent des effets indésirables suivant la vaccination, les gens peuvent se concentrer seulement sur une probabilité de 1 % d'avoir des effets indésirables plutôt que sur une probabilité de 99 % de ne pas en avoir tout en étant protégés contre la maladie.

Biais d'optimisme

Tendance à avoir une vision optimiste irréaliste d'un risque particulier pour la santé, en croyant qu'il est plus élevé pour d'autres personnes que pour soi-même. Par ex., les gens ne se considèrent pas comme étant exposés au risque car ils se croient en bonne santé, non sensibles à la maladie et suffisamment forts pour la combattre.

Biais du présent

Tendance à accorder plus de poids aux coûts et aux avantages actuels et moins de poids à ceux qui seront réalisés dans le futur. Par ex., les inconvénients des vaccins sont plus immédiats que les bénéfices futurs de l'immunité contre une maladie.

Protection de valeurs

Tendance à protéger des valeurs absolues qui, selon les croyances, ne peuvent être mises dans la balance avec d'autres considérations. Par ex., croire au droit absolu des parents de refuser la vaccination.

Les biais cognitifs liés à des croyances antérieures concernant la vaccination
Biais de confirmation

Tendance à se rappeler et à interpréter des informations qui confirment nos croyances existantes. Par ex., les personnes qui hésitent à se faire vacciner peuvent sous-estimer la dangerosité de la maladie et surestimer les effets indésirables potentiels de la vaccination.

Biais de croyance

Tendance à évaluer la validité d'un argument en fonction de la crédibilité ou de la désirabilité de la conclusion. Par ex., discuter de l'innocuité des vaccins en termes d'effets indésirables légers avec des personnes qui pensent que les politiques de vaccination sont motivées par le profit des grandes entreprises serait inefficace.

Biais lié à l'information partagée

Tendance à consacrer plus de temps et d'énergie aux informations que les membres d'un groupe connaissent bien et moins de temps et d'énergie aux nouvelles informations. Par ex., se concentrer sur un nombre limité de sujets anti-vaccins comme le lien, démystifié, entre le vaccin ROR et l'autisme dans des chambres d'échos anti-vaccins en ligne.

Effet de faux consensus

Tendance à surestimer la mesure dans laquelle la population générale partage ses convictions. Par ex., sur les médias sociaux, les mères qui hésitent à se faire vacciner sont plus susceptibles de s'engager dans une communication sur le sujet. Cela crée des communautés en ligne avec un faux consensus élevé sur l'hostilité au vaccin.

Les plans, interventions et messages visant à augmenter la couverture vaccinale devraient, en plus de communiquer les données sur la sécurité des vaccins et leurs effets secondaires, être conçus de façon à diminuer les effets des biais cognitifs potentiels, soulignent les auteurs en conclusion.

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

(1) Mohsen Farhadloo, Rustam Vahidov & Louise Pilote.

Psychomédia avec sources : BMC Public Health, The Conversation (Canada).
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