L'ibuprofène (Nurofen, Advil, Upfen Antarene...) et le kétoprofène (Profenid, Toprec, Ketum), les deux médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) les plus utilisés en France contre la fièvre ou la douleur, jouent un rôle aggravant en cas d’infection, selon la conclusion d'une enquête de pharmacovigilance dont les résultats sont rendus publics par l'agence française du médicament (ANSM) le 18 avril.

Le communiqué précise :

« Sur l’ensemble des cas rapportés depuis l’année 2000, 337 cas de complications infectieuses avec l’ibuprofène et 49 cas avec le kétoprofène ont été retenus après avoir pris en compte uniquement les cas les plus graves chez des enfants ou des adultes (souvent jeunes) sans facteur de risque ni comorbidité.

Il s’agit d’infections sévères de la peau et des tissus mous (dermohypodermites, fasciites nécrosantes,…), de sepsis, d’infections pleuro-pulmonaires (pneumonies compliquées d’abcès, de pleurésie), d’infections neurologiques (empyèmes, abcès cérébraux,…) ou ORL compliquées (cellulites, médiastinites,...), à l’origine d’hospitalisations, de séquelles voire de décès.

Ces complications infectieuses (essentiellement à Streptocoque ou à Pneumocoque) ont été observées après de très courtes durées de traitement (2 à 3 jours), y compris lorsque la prise d’AINS était associée à une antibiothérapie.

Elles sont survenues alors que l’ibuprofène ou le kétoprofène étaient prescrits ou pris en automédication dans la fièvre mais également dans de nombreuses autres circonstances telles que des atteintes cutanées bénignes d’aspect inflammatoire (réaction locale, piqure d’insecte…), des manifestations respiratoires (toux, infection pulmonaire,…) ou ORL (dysphagie, angine, otite,…).

L’analyse de ces cas ainsi que l’analyse des données de la littérature (études expérimentales et études de pharmaco-épidémiologie), suggère que ces infections, en particulier à Streptocoque, pourraient être aggravées par la prise de ces AINS.

L’enquête met également en évidence qu’il persiste une utilisation de ces AINS en cas de varicelle. L’ANSM rappelle que les AINS sont déjà connus comme pouvant être à l’origine de complications cutanées bactériennes graves (fasciite nécrosante) lorsqu’ils sont utilisés au cours de la varicelle et doivent être évités dans ce cas. »

L’ANSM rappelle aux patients et aux professionnels de santé :

  1. « De privilégier l’utilisation du paracétamol en cas de douleur et/ou de fièvre, notamment dans un contexte d’infection courante comme une angine, une rhinopharyngite, une otite, une toux, une infection pulmonaire, une lésion cutanée ou la varicelle, en particulier en automédication. »

  2. « Les règles du bon usage des AINS en cas de douleur et/ou fièvre :

    • prescrire et utiliser les AINS à la dose minimale efficace, pendant la durée la plus courte ;
    • arrêter le traitement dès la disparition des symptômes ;
    • éviter les AINS en cas de varicelle ;
    • ne pas prolonger le traitement au-delà de 3 jours en cas de fièvre ;
    • ne pas prolonger le traitement au-delà de 5 jours en cas de douleur ;
    • ne pas prendre deux médicaments AINS (1) en même temps. »

« L’ANSM a partagé ces résultats avec ses homologues européens afin qu’une analyse collective soit engagée. »

À l'occasion de cet avis de la ANSM, la revue Prescrire précise : « Tous les AINS exposent à des aggravations d'infections, probablement par altération de la réponse immunitaire, dont : surinfections de varicelles et zonas, fasciites nécrosantes, aggravations de certaines infections bactériennes et virales dont la grippe, phlegmons de gorge en complication d'une angine. D'autre part leur effet symptomatique masque peut-être aussi certains signes d’évolution, ce qui conduit à un retard diagnostique et de traitement… »

Pour plus d'informations sur le choix de médicaments antidouleurs, voyez les liens plus bas.

(1) L'ANSM liste les AINS avec une indication antalgique et/ou antipyrétique (hors indication rhumatologique) : acide tiaprofénique, acide méfénamique, acide niflumique, alminoprofène, diclofénac, fénoprofène, flurbiprofène, ibuprofène, kétoprofène, morniflumate et naproxène.

Psychomédia avec sources : ANSM, Prescrire.
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