Quel patient va développer une forme grave de la COVID-19 ? Il est important de répondre à cette question pour améliorer la prise en charge et le pronostic.

Des chercheurs français, dont les travaux ont été publiés en juillet dans la revue Science, ont identifié un déficit immunitaire qui prédit une forme sévère de la maladie.

« Environ 5 % des personnes atteintes de COVID-19 évoluent vers une forme grave ou critique et développent notamment une pneumonie sévère se transformant en syndrome de détresse respiratoire aiguë ».

« Si ces formes surviennent parfois au début de la maladie, les observations cliniques décrivent généralement une progression de celle-ci en deux étapes, commençant par une forme légère à modérée, suivie d’une aggravation respiratoire 9 à 12 jours après l’apparition des premiers symptômes. Cette évolution soudaine suggère une dérégulation de la réponse inflammatoire », précise le communiqué de l'Inserm (1).

« Un nombre croissant d’indications suggère que cette aggravation est provoquée par une forte augmentation des cytokines. Cet emballement de la réponse inflammatoire est corrélé à une infiltration massive dans les poumons de cellules immunitaires innées, à savoir des neutrophiles et des monocytes, créant des lésions pulmonaires et un syndrome de détresse respiratoire aigu. »

« Par analogie avec une maladie génétique conduisant à une pathologie pulmonaire semblable et identifiée à l’institut Imagine par l’équipe du chercheur Inserm Frédéric Rieux-Laucat, l’hypothèse initiale supposait une production excessive des interférons (IFN) de type 1, un marqueur de la réponse aux infections.  »

Or chez les patients gravement malades, les chercheurs de l’Inserm, de l'Université de Paris, de l’APHP et de l’Institut Pasteur ont montré que la production et l’activité des IFN de type I sont fortement diminuées dans les formes les plus sévères de la COVID-19.

« A cela s’ajoute une charge virale sanguine persistante, témoignant du mauvais contrôle de la réplication virale par le système immunitaire et conduisant à l’emballement d’une réponse inflammatoire inefficace et pathologique. »

« L’inflammation, provoquée par le facteur de transcription NF-kB, entraîne par ailleurs une augmentation de la production et de la signalisation du facteur de nécrose tumorale (TNF)-alpha et de l’interleukine IL-6, une cytokine pro-inflammatoire. »

Un taux d’IFN de type 1 caractéristique de chaque stade de la maladie

« Cette faible signature des IFN de type I diffère de la réponse induite par d’autres virus respiratoires tels que le virus respiratoire syncitial humain ou le virus de la grippe A, tous deux caractérisés par une forte production de l’IFN de type I. »

« L’étude révèle par ailleurs que de faibles taux d’IFN de type 1 dans le plasma précèdent l’aggravation clinique des patients et leur transfert en soins intensifs. Les taux d’IFN de type 1 circulant caractériseraient même chaque stade de maladie, les taux les plus bas étant observés chez les patients les plus graves. Ces résultats suggèrent que dans l’infection à SARS-CoV-2 la production de l’IFN de type I est freinée chez l’hôte infecté, ce qui pourrait expliquer les formes sévères plus fréquentes chez des individus faiblement producteurs de cette cytokine, comme les personnes âgées ou ceux ayant des comorbidités. »

La déficience en IFN de type I pourrait donc être une signature des formes graves de la COVID-19 et pourrait permettre d’identifier les personnes à haut risque.

Ces résultats suggèrent que « l’administration d’IFN-alpha combinée avec une thérapie anti-inflammatoire ciblant l’IL-6 ou le TNF-α, ou des corticoïdes comme la dexamethasone, chez les patients les plus sévères pourrait être une piste thérapeutique à évaluer ».

Une autre étude, menée par le chercheur David Smadja (Inserm/Université de Paris), a identifié deux autres biomarqueurs pour repérer les patients hospitalisés les plus à risque. Ces marqueurs « sont des témoins d’une souffrance vasculaire » qui corrèle avec la sévérité de la maladie. « Il est possible que cette mauvaise réponse immunitaire, qui est associée à une réplication virale plus importante, permette un effet pathogène plus important du virus sur le tissu endothélial, libérant alors les marqueurs identifiés par l’équipe de David Smadja », souligne le communiqué de l'Inserm.

Le 20 juillet, des chercheurs de l'University of Southampton (Royaume-Uni) et du laboratoire Synairgen ont annoncé des résultats positifs d'essais cliniques d'une formulation inhalée d'interféron bêta (SNG001) qui pourrait empêcher l'aggravation de la COVID-19 chez les personnes les plus à risque.

La probabilité de développer une maladie grave (nécessitant une ventilation ou entraînant le décès, par exemple) pendant la période de traitement (du jour 1 au jour 16) a été réduite de 79 % pour les patients recevant le SNG001, par rapport à ceux ayant reçu un placebo.

Jusqu'à maintenant, une réduction de la mortalité n'a été montrée que pour une seul médicament, la dexaméthasone. Un autre traitement, l'antiviral remdésivir permet de réduire la durée d'hospitalisation, mais pas la mortalité, rappelle Le Figaro.

Pour plus d'informations sur la COVID-19 et les traitements expérimentaux de la COVID-19, voyez les liens plus bas.

(1) Institut national français de la santé et de la recherche médicale.

Psychomédia avec sources : Inserm, Science, University of Southampton.
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