Un essai clinique randomisé, dirigé par le Dr Jean-Claude Tardif de l'Institut de Cardiologie de Montréal (Québec, Canada), a montré une modeste efficacité de la colchicine pour prévenir les complications graves de la COVID-19 nécessitant une hospitalisation ou entraînant des décès. Les résultats ont été publiés le 27 janvier sur le site de prépublication scientifique MedRxiv.

La colchicine est un médicament anti-inflammatoire administré par voie orale, utilisé dans le traitement de la goutte, la péricardite et les maladies coronariennes.

Alors que les résultats présentés par l'Institut de Cardiologie de Montréal (ICM) dans un communiqué de presse le 23 janvier pouvaient sembler flamboyants, les auteurs mentionnaient qu'ils n'atteignaient pas le seuil de la signification statistique si l'on considérait l'ensemble des participants.

Cet essai randomisé en double aveugle a inclus 4 488 patients patients non hospitalisés, âgés de plus de 40 ans et ayant au moins un facteur de risque de complication grave de la COVID-19 (obésité, diabète...), qui ont été suivis pendant 30 jours.

En ne tenant pas compte de 300 participants dont le diagnostic n'a pas été confirmé par test PCR, les résultats deviennent statistiquement significatifs, mais de peu.

« Chez ces patients avec diagnostic prouvé de COVID-19, la colchicine a entraîné des réductions des hospitalisations de 25 %, du besoin de ventilation mécanique de 50 %, et des décès de 44 % », indique le communiqué du 23 janvier.

Ces résultats peuvent sembler flamboyants, mais il s'agit de différences de risque relatif. Pour ce qui est du risque absolu, sur les 4488 personnes ayant participé à l’étude, 4,7 % de celles faisant partie du groupe colchicine (104 sur 2235) ont été hospitalisées ou sont décédées, contre 5,8 % dans le groupe placebo (131 sur 2253). Le risque absolu n'est ainsi réduit que de 1 %.

Il y a eu 5 (0,2 %) décès dans le groupe colchicine contre 9 dans le groupe (0,4 %) placebo ainsi que 101 (4,5 %) hospitalisations dans le groupe colchicine et 128 (5,7 %) dans le groupe placebo.

Effets secondaires potentiels

Risque de surdose

Dans un article publié le 27 janvier, la revue Prescrire, n'ayant pas encore pu prendre connaissance de l'étude prépubliée, se garde de commenter « une éventuelle efficacité », mais indique que « ce que l'on connaît de la colchicine incite à beaucoup de prudence car son maniement est délicat ».

« La marge thérapeutique de la colchicine est étroite : la dose thérapeutique et la dose toxique sont proches.

La survenue d'une diarrhée est évocatrice d'une surdose. Elle apparaît avant d'autres effets dose-dépendants plus graves, voire mortels, comme les agranulocytoses, les anémies et les thrombopénies.

Les autres signes de surdose de colchicine sont des : douleurs abdominales diffuses, nausées, vomissements ; hypotensions, voire chocs cardiogéniques ; toxicité rénale avec oligurie et hématurie ; pancytopénies ; coagulations intravasculaires disséminées, défaillances multiviscérales. Le risque de surdose est augmenté en cas d'insuffisance rénale ou d'âge supérieur à 75 ans. »

Risque d'interactions médicamenteuses

« Son métabolisme fait prévoir de nombreuses interactions médicamenteuses, indique la revue.

La prise d'un médicament inhibiteur de l'isoenzyme CYP 3A4 du cytochrome P450, par exemple un antibiotique macrolide tel que l'azithromycine (Zithromax ou autre), expose à une surdose de colchicine.

De même, les médicaments qui exposent à une insuffisance rénale, tels que les diurétiques, les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), les sartans, etc., font courir un risque de surdose de colchicine par réduction de son élimination dans les urines. » (Liste des médicaments antihypertenseurs IEC, ARA2 [sartans] et inhibiteurs de la rénine)

Risque pour les femmes enceintes

« La colchicine est tératogène chez l'Animal. Elle est à exclure chez les femmes enceintes ou qui pourraient l'être. »

Dans l'essai clinique de l'ICM, « la posologie testée a été de 0,5 mg deux fois par jour pendant 3 jours, puis 0,5 mg par jour les 27 jours suivants (soit une durée de traitement de 1 mois) », précise la revue.

« En France, la seule spécialité à base de colchicine non associée disponible (Colchicine Opocalcium) est sous forme de comprimés à 1 mg sécables. »

« L'autre spécialité à base de colchicine disponible en France, Colchimax, est à écarter car elle contient en plus de la poudre d'opium et du tiémonium, des substances qui masquent les diarrhées, c'est-à-dire le premier signe d'une surdose. »

Pour plus d'informations sur la COVID-19, voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources : IMC, ICM (27 janvier), MedRxiv, Prescrire.
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