Les enfants de parents souffrant d'un trouble bipolaire (auparavant appelé maniaco-dépression) sont plus sujets à certains problèmes psychosociaux, particulièrement aux comportements sexuels à risque, selon une étude québécoise publiée dans le Journal of Affective Disorders.

Le trouble bipolaire compte parmi les 10 affections les plus invalidantes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), soulignent les auteurs.

La maladie est caractérisée par des périodes de grande euphorie, une fuite des idées et une diminution du besoin de dormir, ainsi que par périodes de profonde tristesse et de désespoir (dépression).

Le trouble bipolaire s’accompagne d’un risque accru de suicide, de toxicomanie, d’hypersexualité, de mésentente familiale et de comportement agressif. Des recherches antérieures ont montré que les enfants de parents atteints du trouble présentent un risque plus élevé de développer une maladie psychiatrique.

Mark Ellenbogen et Rami Nijjar du département de psychologie de l’Université Concordia ont suivi des enfants de parents bipolaires et des enfants venant de familles sans trouble mental, de 4 à 12 ans jusqu’au début de l’âge adulte.

Ils ont évalué les 4 comportements suivants : comportement suicidaire; actes autodestructeurs; tabagisme; délinquance ou comportement criminel et comportements sexuels à risque (relations sexuelles avant l’âge de 16 ans, relations sexuelles non protégées, avortements).

Pour les deux sexes, la plus grande différence observée concernait ce dernier type de comportement, lequel peut être vu comme une extension d’autres tendances. "Les comportements sexuels à risque se situent dans le spectre des comportements d’extériorisation généraux, comme la délinquance et l’agression", explique le Pr Ellenbogen. "Nous savons que les comportements d’extériorisation durant la moyenne enfance en sont un prédicteur".

"En psychiatrie, nous avons tendance à axer le traitement sur le patient – jamais nous ne procédons à une évaluation de la famille, des enfants ou du conjoint", dit le chercheur. "Tout au long de ma carrière, j’ai voulu faire comprendre qu’il s’agissait d’une mauvaise façon d’aborder la situation. Les enfants de patients bipolaires présentent un risque élevé d’éprouver différents problèmes psychiatriques et psychosociaux. Nous devons envisager des interventions qui permettent la prise en charge de la famille tout entière."

Il travaille actuellement à mettre sur pied un programme de prévention destiné aux enfants de parents bipolaires. L'intervention, intitulée RUSH (pour Reducing Unwanted Stress in the Home, [« réduire le stress indésirable à la maison »]), consiste en 12 séances de thérapie de groupe. Une démarche de groupe s’adresse aux enfants, pour leur enseigner des stratégies d’adaptation efficaces; une autre est destinée aux parents, pour leur aider à gérer le stress et les mésententes familiales, ainsi qu’à prendre en charge leurs enfants.

Le programme pilote, conçu pour de petits groupes de 5 ou 6 familles, sera offert dès cet été aux résidants de la région de Montréal. Afin de mesurer l’efficacité du programme, le Pr Ellenbogen et son équipe évalueront les comportements, les taux d’hormones de même que l’état de santé mentale des enfants avant et après l’intervention.

"Ces parents ont besoin d’aide additionnelle pour organiser la vie familiale et éduquer les enfants ainsi que pour composer avec leur conjoint, les problèmes quotidiens et le stress", souligne le chercheur. "L’objectif ultime est de diminuer le niveau de stress dans la famille, ce qui, selon nous, aura pour effet d’atténuer les répercussions négatives chez les enfants."

Psychomédia avec source: Université Concordia
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