Le goût des édulcorants (substances sucrantes sans sucre et sans calories ou avec moins de calories) dans les produits alimentaires est de plus en plus difficile à distinguer de celui du sucre.

Mais si les édulcorants peuvent confondre les papilles, ils n'en feraient pas autant avec le cerveau selon certaines études. L'envie de consommer du sucre ne reposerait pas seulement sur le goût que détecte les papilles.

Quelques études, à partir des années 1980, ont suggéré que la consommation régulière de produits sucrés avec des édulcorants pouvait amener à manger plus en stimulant l'appétit sans le satisfaire. Mais la méthodologie de certaines de ces recherches était discutable.

Plus récemment, Guido Frank, psychiatre à l'Université du Colorado à Denver a comparé, chez 12 femmes, comment le cerveau répondait au sucralose (édulcorant d'origine naturelle sans calories) et au sucrose (sucre blanc courant). Les concentrations étaient ajustées pour que les goûts sucrés soient équivalents et les participantes ne pouvaient les distinguer consciemment. Mais des différences apparaissaient dans la réponse du cerveau selon des images cérébrales (par résonance magnétique).

Le sucre produisait une activation plus importante dans les régions dites de récompense (qui s'activent lors d'activités plaisantes) que l'édulcorant. Mais ce dernier synchronisait davantage l'activité dans toute une constellation de régions associées au goût. Le chercheur suggère que l'édulcorant active des régions qui enregistrent le goût plaisant mais pas assez fortement pour satisfaire. "Ce qui peut conduire à manger plus quelque chose de sucré ou de calorique plus tard", dit -il.

Paul Smeets, chercheur en neurosciences à l'Université d'Utrecht (Pays-Bas), a obtenu des résultats similaires en testant deux versions d'une boisson à l'orange, l'une avec sucre et l'autre avec un mélange d'aspartame, saccharine, cyclamate et acésulfame de potassium (édulcorants d'origine chimique sans calories).

La présence ou non de calories pourrait être une variable qui influence l'activation de la région dite de récompense.

Une série d'expériences menée par Edward Chambers de l'Université de Birmingham (Royaume-Uni) a suggéré que le cerveau pouvait détecter, alors que les aliments sont encore en bouche et indépendamment du goût sucré, l'apport en calories. Dans l'une des expériences, des cyclistes performaient mieux lorsqu'ils goûtaient sans l'avaler une solution de glucose (sucre) comparativement à une solution de saccharine (édulcorant sans calories). Plus surprenant, ils performaient mieux lorsqu'ils goûtaient une solution de saccharine à laquelle était ajouté un édulcorant sans sucre mais fournissant des calories (la maltodextrine) comparativement à une solution de saccharine seule. La combinaison de saccharine et de maltodextrine (avec calories) activait des régions du système de récompense que n'activait pas la saccharine (sans calories) seule.

Des chercheurs suggèrent que la texture des aliments pourrait être une indication utilisée par le cerveau pour distinguer les sucres et les édulcorants. Les édulcorants, étant plus sucrants, sont utilisés en quantité beaucoup moindre ce qui modifie la texture. L'utilisation de substances modifiant la texture des boissons et des aliments sucrés avec édulcorants est l'une des voies explorées pour amener le cerveau à réagir de la même façon aux édulcorants qu'au sucre.

Une approche alternative (chez Coca-Cola) explore l'influence d'une amplification de la perception du goût sucré (en modifiant l'action de certains récepteurs de la langue) sur les réactions du cerveau dans le but de pouvoir réduire les quantités de sucre (plutôt que de sucrer avec des édulcorants). Cette approche représente un compromis par rapport aux boissons sans calories mais pourrait être plus efficace pour le contrôle du poids et pour les personnes désireuses de maigrir si elle peut convaincre le cerveau qu'il a reçu les calories convoitées.

Psychomédia avec source : New Scientist
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