Un consortium de onze organisations internationales de recherche médicale (1) étudie les cellules immunitaires hyperactives comme cause possible des décès dus à la COVID-19.

Des essais cliniques débuteront dans les prochaines semaines pour vérifier si un médicament actuellement employé pour traiter la fibrose kystique pourrait contrer cette réaction immunitaire excessive.

Dans une étude publiée le 16 avril dans le Journal of Experimental Medicine, le groupe a établi un lien entre l'infiltration de neutrophiles, des cellules immunitaires, dans les poumons et les symptômes de la COVID-19.

Le groupe étudie si les cellules immunitaires hyperactives qui produisent des pièges extracellulaires de neutrophiles (dits Neutrophil Extracellular Traps ou NETs) sont à l'origine des cas les plus graves.

Le consortium, appelé NETwork, comprend notamment le Laboratoire Cold Spring Harbor (États-Unis), les Feinstein Institutes for Medical Research (États-Unis), l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM, Québec) et le CHU de Nancy (France).

L'étude « décrit que les patients atteints d'une infection grave causée par la COVID-19 développent un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), une inflammation pulmonaire, d’épaisses sécrétions de mucus dans les voies respiratoires, des lésions pulmonaires étendues et des caillots sanguins », décrit le communiqué de l'IR-CUSM.

Ce stade avancé de la maladie est difficile à gérer. Dans le pire des cas, les patients ont besoin d'une ventilation mécanique invasive, et néanmoins, un grand nombre de patients meurent. (COVID-19 : comment sont traitées les pneumonies ?)

« L’équipe de NETwork suggère que la gravité de la COVID-19 pourrait résulter de l'hyperactivité de globules blancs appelés neutrophiles. Les neutrophiles, qui font partie du système immunitaire de l'organisme, détectent les bactéries et peuvent expulser leur ADN pour les attaquer à l'aide d'un réseau d'ADN attaché à des enzymes toxiques, appelé NET. Ces NETs peuvent piéger et digérer l'agent pathogène indésirable, mais dans les cas de SDRA, ils endommagent les poumons et d'autres organes. »

« Étant donné les similitudes évidentes entre la présentation clinique de la COVID-19 grave et d'autres maladies connues provoquées par les NETs, telles que le SDRA, nous proposons que l'excès de NETs puisse jouer un rôle majeur dans la maladie », a expliqué Betsy Barnes, professeure aux Feinstein Institutes et coauteure.

« Au fur et à mesure que des échantillons de patients seront disponibles, il sera important de déterminer si la présence de NETs est associée à la gravité de la maladie et/ou à des caractéristiques cliniques particulières de la COVID-19 ».

« Les NETs ont été identifiés en 2004, mais de nombreux scientifiques n'en ont jamais entendu parler. La plupart des chercheurs du groupe NETwork ont travaillé sur des NETs présents dans d'autres maladies, et quand nous avons commencé à entendre parler des symptômes des patients atteints de COVID-19, cela nous a semblé familier », a expliqué Mikala Egeblad, biologiste du cancer au Laboratoire Cold Spring Harbor et coauteure.

Jonathan Spicer de l'IR-CUSM et professeur adjoint de chirurgie à l'Université McGill, a été témoin des effets dévastateurs de la COVID-19 au chevet des patients.

« Nous voyons chez ces patients des lésions pulmonaires graves connues sous le nom de SDRA, un autre problème sérieux causé par un excès de NETs et observé dans les cas sévères de grippe », a-t-il expliqué. « Leurs voies respiratoires sont souvent obstruées par un mucus épais et, contrairement à ce que l’on observe pour la plupart des infections pulmonaires graves, ces patients ont tendance à former de petits caillots dans tout leur corps à un rythme beaucoup plus élevé que la normale. Des NETs ont également été trouvés dans le sang de patients atteints de septicémie ou de cancer, où ils peuvent faciliter la formation de tels caillots. »

Les chercheurs poursuivent des études pour savoir si les NETs sont une caractéristique commune des cas de COVID-19. Si leurs conclusions montrent que les excès de NETs provoquent les symptômes graves de la COVID-19, alors une nouvelle piste thérapeutique pourrait être envisagée pour aider les patients atteints de COVID-19.

« Les traitements actuels utilisés pour d'autres maladies causées par les NETs ou les neutrophiles comme la fibrose kystique, la goutte et la polyarthrite rhumatoïde pourraient atténuer l'activité des NETs chez les patients atteints de COVID-19, réduisant ainsi le besoin de recourir à une ventilation mécanique invasive. »

McGill sera l’un des premiers centres à débuter dans les prochaines semaines des essais cliniques visant à tester ces médicaments chez des personnes atteintes de la COVID-19, rapporte Le Devoir.

Un des médicaments qui sera étudié, rapporte Le Devoir, sera l'enzyme désoxyribonucléase du laboratoire Roche. Mis au point dans les années 1990 pour traiter les personnes atteintes de la fibrose kystique, il s'agit d'une production industrielle d’une protéine qui existe de façon naturelle dans le corps, la « Dnase ».

Pour plus d'informations sur l'épidémie de la COVID-19 et sur les traitements expérimentaux, voyez les liens plus bas.

(1) Les instituts de recherche suivants font partie du groupe NETwork :

  • le Laboratoire de Cold Spring Harbor,
  • les Feinstein Institutes for Medical Research,
  • le Centre universitaire de santé McGill,
  • le Weill Cornell Medicine,
  • la Donald and Barbara Zucker School of Medicine at Hofstra/Northwell,
  • le Centre hospitalier universitaire de Nancy,
  • l’Université du Michigan,
  • l’Université de Californie à San Francisco,
  • l’Université du Texas,
  • le MD Anderson Cancer Center,
  • l’École de médecine de l’Université de l’Utah le Northwell Health.

Psychomédia avec sources : Centre universitaire de santé McGill, Journal of Experimental Medicine, Le Devoir.
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