L'utilisation d'anti-inflammatoires et de stéroïdes pour soulager la douleur pourrait augmenter les risques de développer une douleur chronique, selon une étude publiée en mai 2022 dans la revue Science Translational Medicine.

« L’inflammation fait partie du processus normal de guérison d’une blessure douloureuse, et en la contrant au moyen de médicaments, on risquerait de rendre le traitement de la douleur plus difficile », explique le communiqué des chercheurs.

« Depuis des décennies, nous utilisons des anti-inflammatoires pour traiter la douleur. Toutefois, nous avons découvert que cette solution à court terme risquait de causer des problèmes à long terme », explique Jeffrey Mogil, professeur au département de psychologie de l'Université McGill et titulaire de la chaire E. P. Taylor sur la douleur.

Mogil et ses collègues (1) ont découvert que les neutrophiles - un type de globules blancs qui aide à combattre les infections - jouent un rôle clé dans la résolution de la douleur.

En effectuant des analyses géniques chez 98 personnes souffrant de douleurs lombaires, « nous avons observé, au fil du temps, des changements dans les gènes des sujets dont la douleur avait disparu. Le principal facteur serait une modification des cellules sanguines, principalement des neutrophiles, et de leur activité », explique Luda Diatchenko, professeure à la Faculté de médecine et titulaire de la Chaire d'excellence en recherche du Canada sur la génétique de la douleur humaine.

L'inflammation joue un rôle clé dans la résolution de la douleur

« Les neutrophiles sont très présents aux premiers stades de l’inflammation et ouvrent la voie à la guérison des tissus lésés. L’inflammation a sa raison d’être, et il pourrait être dangereux de tenter de l’enrayer », explique le professeur Mogil.

Dans une étude menée sur la souris, les chercheurs ont observé que le blocage expérimental des neutrophiles a prolongé la douleur jusqu'à dix fois sa durée normale, rapporte le communiqué. « Le traitement de la douleur à l'aide d'anti-inflammatoires et de corticostéroïdes comme la dexaméthasone et le diclofénac a également produit le même résultat, bien qu'ils aient été efficaces contre la douleur au début. »

« Ces résultats sont également corroborés par une analyse distincte portant sur 500 000 personnes au Royaume-Uni, qui a montré que les personnes prenant des anti-inflammatoires pour traiter leur douleur étaient plus susceptibles de souffrir de douleurs deux à dix ans plus tard, un effet qui n'a pas été observé chez les personnes prenant de l'acétaminophène ou des antidépresseurs. »

Reconsidérer le traitement médical standard de la douleur aiguë

« Nos résultats suggèrent qu'il est peut-être temps de reconsidérer la façon dont nous traitons la douleur aiguë. Heureusement, la douleur peut être combattue par d'autres moyens qui n'impliquent pas d'interférer avec l'inflammation », conclut Massimo Allegri, médecin à l'hôpital Policlinico de Monza en Italie et à l'Ensemble Hospitalier de la Cote en Suisse.

« Nous avons découvert que la résolution de la douleur est en fait un processus biologique actif », déclare la professeure Diatchenko. « Ces résultats devraient être suivis d'essais cliniques comparant directement les anti-inflammatoires à d'autres analgésiques qui soulagent les douleurs mais ne perturbent pas l'inflammation. »

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(1) Marc Parisien, Lucas V. Lima, Concetta Dagostino, Nehme El-Hachem, Gillian L. Drury, Audrey V. Grant, Jonathan Huising, Vivek Verma, Carolina B. Meloto, Jaqueline R. Silva, Gabrielle G. S. Dutra, Teodora Markova, Hong Dang, Philippe A. Tessier, Gary D. Slade, Andrea G. Nackley, Nader Ghasemlou, Jeffrey S. Mogil, Massimo Allegri, Luda Diatchenko.

Psychomédia avec sources : McGill University, Science Translational Medicine.
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