Dans un essai publié dans la revue Nature portant sur la neurochimie de l'attachement et de la sexualité, Larry J. Young, neurobiologiste et professeur de psychiatrie à l'université Emory, évoque la possibilité que les découvertes dans ce domaine conduisent au développement de drogues (ou médicaments, de l'anglais "drugs") qui augmentent ou diminuent l'amour pour quelqu'un. Certains produits commencent d'ailleurs à apparaître sur le marché avec des prétentions aphrodisiaques (parfums) ou facilitatrices de relation, ce qui est nettement prématuré selon le chercheur.
Les recherches de Young ont porté sur les gènes et les hormones impliqués dans la sexualité et l'attachement chez le campagnol des prairies, un mammifère qui s'accouple pour la vie. Ces gènes et hormones existent chez les humains aussi. De ses recherches, et d'autres réalisées chez les humains, il conclut que deux hormones étroitement apparentées, l'oxytocine (ou ocytocine) et la vasopressine jouent des rôles importants dans la sexualité animale et humaine. Ce qui n'exclut d'aucune façon l'importance des influences sociales et psychologiques sur la sexualité.

Chez les campagnols, l'ocytocine est impliquée dans les contractions utérines à l'accouchement, dans la lactation et dans le lien avec les bébés. (Un lien entre l'ocytocine et l'attachement de la mère pour son nouveau-né a également été montré chez les humains).

L'hormone est aussi responsable du lien qui dure toute leur vie entre mâles et femelles chez cette espèce animale. La vasopressine est étroitement reliée à l'ocytocine mais elle dépend de la testostérone, elle est considérée comme une version mâle de l'ocytocine. Les campagnols des prairies ont plus de récepteurs de la vasopressine que ceux des montagnes qui ne sont pas monogames. Le lien entre la vasopressine et la monogamie est montré par le fait qu'en modifiant un gène ( AVPR1A) de façon à augmenter le nombre de récepteurs de la vasopressine chez les campagnols des montagnes, ils deviennent plus monogames.

Une recherche menée par Hasse Walum de l'Institut Karolinska à Stockholm, publiée en septembre dernier, a montré que, chez les hommes, une variation de ce gène, était liée à l'attachement et à la fidélité à leur compagne. Deux hommes sur 5 porteraient la variante associée à un taux plus élevé de discorde et de divorce dans les couples. Des variations de ce gène ont également été associées à des niveaux différents de générosité et de confiance chez des participants jouant à un jeu d'argent.

Peut-on intervenir sur les niveaux de ces hormones afin d'améliorer les capacités de former des relations?

Dans le cas de la vasopressine, "cela pourrait être aussi simple que d'administrer plus de vasopressine aux hommes", dit Young. "Mais cela pourrait ne pas être aussi facile; le nombre et la location des récepteurs de l'hormone peuvent être plus importants que la quantité d'hormone".

Dans le cas de l'ocytocine cependant des expérimentations ont déjà été faites. Une recherche publiée en décembre dernier dans la revue Biological Psychiatry montrait que l'administration d'une dose de cette hormone sous forme de vaporisateur nasal réduisait le niveau de l'hormone du stress, le cortisol, chez les couples qui se disputent et qu'elle renforçait les comportements positifs. Une autre, publiée en 2005 dans la revue Nature, montrait qu'une dose de l'hormone augmentait la confiance en l'autre et la sensibilité aux émotions de l'autre chez des participants jouant à un jeu d'argent.

L'ocytocine est déjà vendue commercialement sous forme de vaporisateur nasal comme une "hormone de la confiance". Une publicité prétend qu'elle peut "produire une amélioration significative du charisme et créer une apparence d'être digne de confiance". Une autre qualifie son produit de "grand séducteur des femmes".

Concernant les parfums déjà sur le marché contenant de l'ocytocine, les niveaux contenus sont trop faibles pour que ces produits agissent comme aphrodisiaques, selon Young. Il est beaucoup trop tôt pour commercialiser ces hormones de cette façon, met-il en garde. "Nous ne sommes qu'au début de nos études de laboratoire et les gens doivent être extrêmement prudents", dit-il.

Les implications biologiques, sociales, thérapeutiques, éthiques, ... du recours à ces hormones sont évidemment loin d'être résolues.

Psychomédia avec sources:
Globe and Mail
BBC
Washington Post