Certaines personnes ont une incapacité ou une capacité réduite à évoquer des images mentales. Une étude publiée ce mois-ci dans la revue Cortex, rapportée par le New York Times, nomme cette condition « aphantasie » d'après le mot grec « phantasia » utilisé par Aristote pour décrire le pouvoir de l'imagerie ou de l'imagination visuelle.

En 2010, Adam Z.J. Zeman de l'Université d'Exeter (Royaume-Uni) et ses collègues (1) ont signalé un cas particulièrement « pur » de trouble de génération de l'imagerie, chez un homme de 65 ans suite à une angioplastie coronaire.

Après que le chroniqueur Carl Zimmer du New York Times eut popularisé cette étude en la rapportant dans le magazine Discover, les chercheurs ont été contactés par plus de 21 personnes qui se reconnaissaient dans la description de cette « cécité de l'imagination ». Cinq d'entre elles rapportaient que des membres de leur famille présentaient aussi le même déficit.

C'est avec ces personnes que Zeman et ses collègues (1) ont mené la présente étude. Elles ont généralement pris conscience de leur condition dans leur adolescence ou dans la vingtaine quand ils ont réalisé que la plupart des gens, qui voyaient les choses mentalement, jouissaient d'une expérience quasi visuelle.

Par exemple, rapporte le chroniqueur, Thomas Ebeyer, un étudiant canadien de 25 ans, a découvert son état en parlant avec son amie. Il a été frappé par le fait qu'elle pouvait se rappeler ce que quelqu'un portait un an auparavant. Elle a répondu qu'elle pouvait voir une image dans son esprit.

« Je n'avais aucune idée de ce dont elle parlait », a-t-il rapporté dans une interview. Il a été surpris de découvrir que tout le monde qu'il connaissait pouvait invoquer des images dans leur esprit.

Malgré leur déficit important (9/21) ou complet (12/21) de l'imagerie visuelle volontaire, la majorité des participants décrivait une imagerie involontaire qui pouvait se produire pendant l'éveil, généralement sous la forme de « flash » (10/21) et/ou au cours de rêves (17/21).

Quatorze des participants signalaient des difficultés avec la mémoire autobiographique. Le même nombre identifiait des forces compensatoires dans les domaines verbal, mathématique et logique.

L'aphantasie se révélera, dans des recherches futures, être une variante de fonctionnement neuropsychologique semblable à la synesthésie et à la prosopagnosie congénitale, croient les chercheurs. L'aphantasie peut avoir une certaine relation spécifique à ces troubles, la prosopagnosie congénitale étant associée à une capacité de visualisation anormalement faible et la synesthésie à une capacité inhabituellement grande.

Les descriptions données par les participants suggèrent que, dans certains cas, la mémoire visuelle est conservée même si l'imagerie visuelle est absente, tandis que d'autres ne fonctionneraient qu'avec des représentations non-visuelles dans les tâches de mémoire.

Des études cliniques précédentes ont suggéré l'existence de deux grands types de déficits de l'imagerie visuelle : 1) des troubles de la mémoire visuelle, causant à la fois l'agnosie visuelle et la perte de l'imagerie, et 2) le déficit de « génération de l'imagerie ».

Afin d'avoir une meilleure idée de la prévalence de l'aphantasie, Adam Z. J. Zeman a envoyé un questionnaire à des milliers de personnes à Exeter.

Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.

(1) Michaela Dewar et Sergio Della Sala.

Psychomédia avec sources : New York Times, Cortex.
Tous droits réservés