Les émulsifiants font partie des additifs alimentaires les plus largement utilisés par l’industrie agroalimentaire. Ils sont utilisés pour améliorer la texture et prolonger la durée de conservation des aliments.

On les retrouve dans de nombreux aliments transformés tels que crèmes glacées, produits de boulangerie, sauces…

Par exemple, des émulsifiants comme la lécithine et les polysorbates garantissent la texture onctueuse des crèmes glacées industrielles et évitent qu’elles ne fondent trop rapidement une fois servies.

De précédents travaux menés par l’équipe de Benoît Chassaing (Inserm/CNRS/Université Paris Cité) ont montré que les émulsifiants tels que la gomme de cellulose (CMC, E466, carboxyméthylcellulose) et le Polysorbate 80 (P80, E433, monooléate de sorbitane polyoxyéthylène) entraînait l’altération du microbiote intestinal et son interaction avec l’appareil digestif. Ces travaux ont aussi montré que ces altérations conduisent à une inflammation intestinale chronique et à des dérégulations métaboliques.

Plus précisément, ils « ont montré que la consommation d’émulsifiants alimentaires induisait la capacité de certains éléments du microbiote à rentrer en contact étroit avec l’épithélium – la première ligne de défense de l’appareil digestif qui normalement est stérile ».

Une nouvelle étude de cette équipe, publiée en janvier 2023 dans la revue Gut, montre qu'un probiotique pourrait contrer les effets nocifs des émulsifiants. (Qu'est-ce que les probiotiques et les prébiotiques ? Dans quels aliments se trouvent-ils ?)

« Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont voulu contrecarrer les effets délétères induits par la consommation d’émulsifiants en fortifiant l’épithélium intestinal. Pour cela, ils se sont intéressés plus spécifiquement à la bactérie Akkermansia muciniphila, qui, naturellement présente dans l’intestin, a déjà révélé avoir un impact sur les interactions du microbiote avec le reste de l’organisme. »

Par ailleurs, on sait que la quantité de cette bactérie se retrouve diminuée suite à la consommation d’agents émulsifiants.

Des groupes de souris ont ainsi reçu des agents émulsifiants par le biais de leur alimentation, supplémentée ou non avec une dose quotidienne d’Akkermansia muciniphila.

Tandis que la consommation d’agents émulsifiants alimentaires était suffisante pour induire une inflammation chronique associée à des altérations du métabolisme et à une hyperglycémie, les souris recevant Akkermansia muciniphila étaient totalement protégées contre de tels effets. L’administration d’Akkermansia muciniphila a aussi été suffisante pour prévenir l’ensemble des altérations moléculaires normalement induites par la consommation d’agents émulsifiants, et notamment le rapprochement des bactéries de la paroi de l’épithélium.

« Ce travail conforte la notion que l’utilisation d’Akkermansia muciniphila en tant que probiotique pourrait être une approche pour maintenir la santé métabolique et intestinale contre les stress modernes tels que les agents émulsifiants qui promeuvent l’inflammation intestinale chronique, et les conséquences néfastes qui en résultent. »

« De plus, cela suggère que la colonisation intestinale par Akkermansia muciniphila pourrait prédire la propension individuelle à développer des désordres intestinaux et métaboliques suivant la consommation d’émulsifiants : plus la présence de la bactérie est importante, plus l’individu serait protégé des effets néfastes des additifs alimentaires sur le microbiote », explique Benoît Chassaing.

D'autres additifs alimentaires peuvent affecter la santé intestinale : voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources : Inserm, Gut, Eufic.
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