« Au 23 mars 2020, on ne dispose pas de résultats d'essai pertinent montrant une éventuelle efficacité de l'hydroxychloroquine associée ou non avec l'azithromycine », indique la revue Prescrire.

Et, « des résultats d'un essai randomisé n’ont pas montré d'efficacité de l'association lopinavir + ritonavir (Kaletra) », un médicament déjà utilisé contre le VIH, en cas de covid-19 sévère.

« Avant d’en savoir plus, il est important de mettre l'efficacité hypothétique du médicament proposé en balance avec ses effets indésirables déjà connus et prévisibles, pour éviter d'ajouter du mal au mal. »

Chloroquine et azithromycine

« Au 23 mars 2020, l’hydroxychloroquine (Plaquenil), un dérivé de la chloroquine (un antipaludique), qui a aussi un effet immunodépresseur faible, et l’azithromycine (Zithromax ou autre), un antibiotique macrolide, sont mis en avant. »

L'hydroxychloroquine est le fameux médicament dans lequel le président Donald Trump a dit mettre de l'espoir. Elle est habituellement utilisée pour traiter certaines maladies auto-immunes (polyarthrite rhumatoïde et lupus érythémateux) et pour prévenir des formes d'allergies au soleil. Elle doit sa renommée actuelle au professeur Didier Raoult, directeur de l'Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection, à Marseille. Il est l'auteur de l'étude française que décrit Prescrire dans ce qui suit.

« Concernant la chloroquine et son dérivé l'hydroxychloroquine, environ une vingtaine d'essais cliniques figurent dans les registres d'essais depuis début février 2020, surtout en Chine.

Au 23 mars 2020, aucun résultat d'essai comparatif randomisé n'a été publié. Des résultats d'une étude française débutée le 5 mars 2020 ont été rendus publics le 20 mars 2020. Son objectif principal était d'étudier le portage du virus chez des patients traités par l'hydroxychloroquine. Cette étude n’est pas un essai randomisé et les patients du groupe témoin semblent avoir été recrutés de façon très différente de ceux du groupe hydroxychloroquine, ce qui rend la comparaison peu pertinente.

Parmi les 26 patients qui ont reçu l'hydroxychloroquine : 3 patients ont été transférés en réanimation ; un patient est mort. Deux autres patients ont décidé de ne plus participer à l'étude. Aucune évolution de ce type n'est décrite parmi les 16 patients témoins. Dans le groupe traité par l’hydroxychloroquine, parmi les 18 patients dont la date de début des symptômes est connue, le délai médian avant non-détection du virus dans la gorge a été de 7,5 jours, avec un large intervalle de confiance. Faute de groupe témoin recruté selon un protocole semblable et avec un suivi dans les mêmes conditions, on ne sait pas si ce délai est plus court ou non qu'en l'absence d'hydroxychloroquine.

Dans cette étude, chez les 6 patients qui ont pris de l'azithromycine en plus de l'hydroxychloroquine, ce délai médian a été de 7 jours. Au 23 mars 2020, il n'a pas été publié d'autres données d'évaluation chez les patients atteints de covid-19 étayant l'utilisation de l'azithromycine. »

Lopinavir + ritonavir (Kaletra ou autre)

« L'intérêt de l'association antirétrovirale lopinavir + ritonavir (Kaletra ou autre) a été évoqué, du fait de son effet antiviral in vitro contre des coronavirus. »

« Les résultats d'un essai randomisé de l'association lopinavir + ritonavir (Kaletra ou autre) en plus du traitement standard, versus traitement standard seul chez 199 patients hospitalisés en raison d'un covid-19 sévère ont été publiés le 18 mars 2020 (1). Les taux d'amélioration clinique et de mortalité ont été similaires dans les deux groupes. »

« Les résultats des essais comparatifs randomisés déjà menés en Chine, puis de ceux qui débutent en Europe et en Corée du Sud devraient nous aider à y voir plus clair. » (Covid-19 : la chloroquine inclue dans l'essai clinique de 4 médicaments lancé dans 7 pays européens)

« Quelle que soit la situation, en cas d'expérimentation, les patients (ou leur entourage) ont à être informés des incertitudes, y compris quant au risque d'aggravation de la maladie tant que cet aspect n'a pas encore été évalué. »

« Il est souhaitable que toute expérimentation soit effectuée dans un cadre de recherche avec protocole, collecte des données, interprétation prudente. »

« En pratique, pour chaque patient, l'efficacité, hypothétique, est à mettre en balance avec les effets indésirables déjà connus et prévisibles du médicament proposé, en tenant compte aussi d'éventuels effets défavorables sur l'infection », conclut la revue. « Sans oublier les interactions avec les autres médicaments pris par le patient. »

Pour plus d'informations sur l'épidémie du COVID-19 et sur les médicaments expérimentaux testés pour le traitement de la maladie, voyez les liens plus bas.

(1) Étude chinoise publiée dans le New England Journal of Medecine.

Psychomédia avec sources : Prescrire, UFC-Que Choisir.
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