La fibromyalgie est l'un des troubles de douleur généralisée les plus fréquents. Les mécanismes neurobiologiques demeurent mal compris et il n'existe pas de traitement modifiant le cours de la maladie.

« Un lien nouvellement identifié avec la résistance à l'insuline pourrait changer radicalement la façon dont la fibromyalgie et certaines autres formes de douleurs chroniques apparentées sont identifiées et prises en charge », s'enthousiasment les auteurs d'une étude publiée en mai 2019 dans la revue scientifique PLOS One.

Miguel A. Pappolla, professeur de neurologie à l'Université du Texas à Galveston, et ses collègues de plusieurs institutions incluant les National Institutes of Health ont montré qu'un test sanguin de résistance à l'insuline, couramment utilisé, permettait de distinguer les personnes atteintes de fibromyalgie de celles en santé.

« Des études précédentes ont découvert que l'insulinorésistance entraîne un dysfonctionnement des petits vaisseaux sanguins du cerveau. Comme ce problème est également présent dans la fibromyalgie, nous avons cherché à savoir si la résistance à l'insuline pourrait être le chaînon manquant dans ce trouble », explique le chercheur.

Pappolla et ses collègues ont analysé, rétrospectivement, des données concernant 23 patients ayant été référés à une clinique de la douleur pour le traitement d'une douleur généralisée des muscles et des tissus conjonctifs. Ils rencontraient tous les critères diagnostiques de 1990 (points douloureux à la pression) et ceux de 2010. (TEST : Rencontrez-vous les critères diagnostiques de 2010)

De tous les analytes examinés, seuls les taux de HbA1c, qui reflètent la glycémie moyenne des deux ou trois derniers mois, permettaient de distinguer les participants atteints de fibromyalgie des sujets témoins. Ils étaient significativement plus élevés chez ceux atteints de fibromyalgie que ceux des témoins appariés selon l'âge.

« Les prédiabétiques présentant des valeurs légèrement élevées d'A1c présentent un risque plus élevé de développer une douleur centrale (d'origine cérébrale), une caractéristique de la fibromyalgie et d'autres troubles douloureux chroniques. » (Fibromyalgie, syndrome de fatigue chronique, syndrome du côlon irritable et autres douleurs chroniques résulteraient d'une dérégulation du système nerveux central)

« Compte tenu des recherches extensives sur la fibromyalgie, nous étions perplexes à l'idée que les études antérieures n'aient pas identifié ce lien », explique Pappolla. « La principale raison est qu'environ la moitié des patients atteints de fibromyalgie ont des valeurs de HbA1c qui se situent dans la plage normale. Il s'agit de la première étude à analyser ces niveaux normalisés en fonction de l'âge de la personne, car les niveaux optimaux de HbA1c varient au cours de la vie. L'ajustement en fonction de l'âge des patients était essentiel pour mettre en évidence les différences entre les patients et les sujets témoins. »

« Malgré le fait que de nombreux patients atteints de fibromyalgie présentaient des valeurs d'HbA1c dans la plage normale (égales ou inférieures à 5,6 %), lorsque nous avons stratifié les données dans un continuum d'âge, une différence nette entre les groupes (fibromyalgie versus témoins) est apparue. »

Parmi les patients atteints de fibromyalgie, 16 se sont fait prescrire la metformine (Glucophage…), un médicament antidiabétique qui cible l'insulinorésistance, en ajout à leur traitement standard, lequel incluait les antidépresseurs amitriptyline, duloxétine (Cymbalta) ou milnacipran (Ixel) et/ou la gabapentine (Neurontin) ou la prégabaline (Lyrica).

Ils ont obtenu une réduction importante de leur niveau de douleur. Chez 8 d'entre eux (50 %), la douleur a complètement disparu. Aucun participant du groupe de fibromyalgiques n'ayant pas reçu la metformine n'a connu une telle diminution de la douleur. L'effet analgésique de la metformine se poursuivait à long terme.

« Bien que préliminaires, ces résultats suggèrent une relation pathogène entre la fibromyalgie et la résistance à l'insuline, ce qui pourrait conduire à un changement radical de paradigme dans la gestion de ce trouble », concluent les auteurs.

« La résistance à l'insuline est de plus en plus associée à un grand nombre de troubles neurologiques », rapportent-ils. « Et la fibromyalgie peut s'ajouter à celles-ci. Nos données fournissent une évidence préliminaire suggérant que l'insulorésistance pourrait être un substrat pathologique pour la fibromyalgie et préparent le terrain pour de futures études visant à confirmer ces observations initiales. »

Pour plus d'informations sur la fibromyalgie, ses causes potentielles et les traitements, voyez les liens plus bas.

(1) Clark Andersen, Xiang Fang, Laxmaiah Manchikanti, Nigel Greig, Fawad Ahmed, Michael Seffinger et Andrea Trescot.

Psychomédia avec sources : UTMB Health, PLOS One.
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